À propos du baptême de Jésus
Nous voici ensemble au cœur du mystère chrétien.
Mystère auquel plusieurs de nos contemporains, baptisés
pourtant, refusent maintenant de considérer de près. Dire
non à son passé religieux est souvent plus facile que de
l’évaluer. Nier est plus rapide que croire. Fermer une porte
est souvent plus facile que d’ouvrir et d’entrer dans la
maison.
Tout ceci dit, essayons ensemble d’évaluer le baptême
que nous avons reçu… il y a… oublions le nombre
d’années!
Cette célébration liturgique de baptême de Jésus
pose en effet plusieurs questions à nos esprits facilement énervés
quand il s’agit de la religion traditionnelle. Pourquoi Jésus,
qu’on dit divin Fils de Dieu, entretient-il un lien privilégié avec
Jean le Baptiste populaire oui, très populaire mais « de
droite… », plutôt conservateur dans ses options
et certains rites? Comment Jésus qui, après plus d’années
d’anonymat, se montre en public et commence par se soumettre à une
sorte de baptême très particulier? Disons-le tout de suite,
ces questions sont valides, Jean le Baptiste lui-même a réagi : « Non,
non, je ne suis pas digne même de délier la courroie de
ta chaussure. »
Or Jésus insiste, fait comme tout le monde, se fait baptiser par
Jean le Baptiste. Jésus ne vient pas bousculer les habitudes ni
même les goûts du peuple : il n’est pas venu pour
détruire, mais pour accomplir.
Jésus se sent inspiré. De toute façon, il l’est.
L’évangéliste note qu’aussitôt baptisé,
il prie. Jésus se sent appelé à poser ce geste public. Étape
de sa vie, sa vie publique. Peut-être éprouve-t-il le besoin
d’être rassuré. C’est humain. La tradition apostolique
première raconte même que « du ciel se fit entendre
une voix ». Ciel et terre s’en mêlent. Une colombe.
Une voix qui lui dit : « C’est toi mon Fils… moi
aujourd’hui je t’ai engendré… Je t’ai
mis au monde… » Mystère encore, il est appelé Fils.
La voix signifie que l’autre, Dieu de la synagogue d’à côté,
serait en personne Père à la synagogue, on a toujours dit :
Dieu est comme un Père. Voici que Dieu se dit Père en personne.
Précision à la fois importante et belle. Dieu Père
dans le sens maternel de la proximité et de la bonté et
de la miséricorde…
Voilà! L’essentiel pour nous, comme pour Jésus,
pour Jésus comme pour nous, est cette croyance que Dieu est Père,
notre Père. Disons ce mot selon un sens élargi mystique
plus que simplement littéral. Cette croyance en Dieu-Père-Mère
nous oblige à penser autrement que nos compatriotes juifs et musulmans.
Le Dieu de Jésus-Christ est un Dieu personnel, un Dieu qui sauve,
un Dieu de Compassion, un Dieu du Pardon… Ainsi de suite!
Venons-en à notre propre baptême et considérant
la publicité trop évidente accordée aux pouvoirs
ecclésiastiques dans notre société traditionnelle,
il ne faudrait plus oublier que le baptême est plus important dans
la vie globale de toute communauté ecclésiale que le sacerdoce
ministériel : le baptême me nomme enfant de Dieu, je
suis promis à l’action de l’Esprit, je deviens frère,
sœur du Christ en personne… et appelé à des
ministères à venir.
Le baptême nous met sur une route ouverte, chemin du long pèlerinage
de la vie.
Il nous inscrit à l’intérieur d’une famille,
la famille des élus du Seigneur; il nous donne de participer à la
vie collective de la chrétienté. Comme un passeport qui
te permet d’aller dans plusieurs pays. Passeport fouillis en moins.
Liberté en plus!
Le baptême élargit le champ de nos regards. Désormais,
tu fais partie de la famille des chercheurs du sacré, aligné selon
une tradition ouverte elle-même à l’universel.
Il ne serait pas faux de rappeler en passant que notre Èglise
catholique est aujourd’hui une des institutions les plus accessibles à tous
les continents et pays de la terre… Plus même que les nations
dites unies.
Il ne faudrait pas oublier enfin ces baptêmes de désir,
dont parlaient davantage les spirituels d’autrefois. C’est-à-dire :
toute personne de charité et de contrition parfaite est en un
sens baptisée dans l’Esprit et sauvée.
Voici pourquoi et depuis quelques années le baptême de
Jésus est devenu une des célébrations liturgiques
parmi les plus signifiantes de l’année. Concluons cette
liturgie de la Parole en nous rappelant tout à coup ensemble que
baptisés nous croyons ensemble au même Jésus Fils
du Père, né de Marie, ressuscité, aujourd’hui
avec nous en assemblée, église veut dire assemblée,
aidés de l’Esprit, tous, toutes en route vers la vie dite éternelle.
Que la musique vienne comme baptiser nos mots et peut-être les
racheter!