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27e dimanche ordinaire A

5 octobre 2008

L’espérance malgré tout…

Guy Lapointe

Guy Lapointe
Isaïe 5, 1-7

Matthieu 21, 33-43

Il y a de la déception et de la violence dans les passages que l’on vient d’entendre. J’ai donné comme titre provisoire à mon homélie : l’espérance malgré tout… ». Un chant d’amour à la vigne. Un chant d’amour qui commence bien et qui finit dans un cri de détresse; une parabole plutôt désespérante, à cause de la violence des vignerons, mais qui finit quand même sur une note d’espérance. C’est aussi ça la parole de Dieu.

Pourtant, y a-t-il quelque chose de plus beau, de plus reposant à voir qu’un champ de vigne? On en a maintenant de magnifiques au Québec. En visitant un vignoble, on a même l’impression qu’il ne devrait pas y avoir de propriétaire. Pourtant dans la parabole racontée, tous  les moyens sont bons pour devenir propriétaire de la vigne et ce jusqu’à l’extrême violence. Il me semble — et c’est ma fantaisie — qu’une vigne, on en hérite; on n’en fait pas la culture seul. C’est un héritage, un lieu de transmission et de travail en commun. La vigne, c’est notre responsabilité, et non notre propriété. Avec humour, je dirais : le propriétaire ne devrait-il pas toujours être parti en voyage… Il y a quelque chose de la proximité. Une vigne, c’est vivant, rien de statique, toujours en devenir au gré des saisons. Et  il y a les vendanges…

Est-ce qu’on aurait pu trouver plus bel endroit que dans un magnifique chant de vigne pour y chanter l’amour. Isaïe le fait, et Jésus aussi à sa façon. C’est le chant, beau comme la vie, où Dieu dit son amour pour Israël, sa vigne, qu’il espère amoureuse. Il dit aussi son amour pour nous. Mais l’amour connaît aussi ses déceptions… Si hélas, la vigne ne répond pas à cet amour fou, tout devient tragique… Ce l’est encore plus dans la parabole de la vigne que nous raconte Jésus. Pour cultiver sa vigne, il a besoin de nous. Au fond, on pourrait reprendre le titre d’un vieux film qui a marqué ma jeunesse croyante : « Dieu a besoin des hommes ». Et on ajouterait aujourd’hui : « et des femmes ».

Je m’imagine Jésus à Jérusalem. Quelques jours avant la Pâque. Peut-être sur l’esplanade du Temple. Jésus devine que tout est joué, qu’en coulisse, déjà, sa mort est programmée. Alors dans une sorte de parabole désespérée, et parce qu’il n’a plus rien à perdre, il se livre tout entier « aux chefs des prêtres et aux pharisiens » en mêlant ses mots à ceux d’Isaïe : « Écoutez cette parabole : « Un homme était propriétaire d’un domaine; il planta une vigne, l’entoura d’une clôture, y creusa un pressoir et y bâtit une tour de garde » (Matt. 21,33).

Écoutez. Dans un raccourci saisissant, il leur raconte leur propre histoire qui est aussi la sienne et la nôtre. Il leur raconte la patience et la passion de Dieu, son incroyable retrait (il partit en voyage…) pour que les ouvriers grandissent et s’engagent. Mais surtout, moment de gravité extrême, l’affirmation : « Je suis l’héritier. Le fils, c’est moi. ». « La pierre qu’ont rejeté les bâtisseurs », c’est moi. Jésus sort du récit de la parabole pour entrer dans un dialogue. Il est à la fois celui qui raconte et le personnage central, le fils assassiné par les vignerons. Comme le propriétaire de la vigne, Dieu est profondément attentif au peuple choisi : « Pourrais-je faire de ma vigne plus que je n’ai fait? » Il y a de l’action dans ce champ de vigne… c’est dur. Le propriétaire fait preuve d’une grande naïveté en envoyant son propre fils à l’abattoir. Jésus s’implique personnellement en racontant cette histoire. C’est en fait la répétition de tant d’autres drames non seulement du peuple d’Israël, mais de toutes celles et ceux qui s’érigent en faux propriétaires, prêts à éliminer tout autour d’eux prêts à éliminer la vie des autres  pour en garder la propriété. Je ne vous ferai pas de dessin… Les mêmes drames se rejouent. On s’installe à la place du propriétaire et de son fils.

Mais il annonce un tournant de l’histoire du salut. Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple autre qui lui, fera produire du fruit. La parabole parle d’Israël. Mais n’est-ce pas, à certains égards, de nous dont il parle, nous qui tentons de vivre l’Évangile en Église. Jésus est la pierre angulaire; il annonce le Royaume où personne n’est exclu… Dans ce Royaume toujours à venir, il faut donner le temps au temps pour que le Royaume advienne, et surtout ne jamais vouloir en devenir les propriétaires. On voit dans la parabole, ce que cela peut donner.

La vigne, c’est l’image du Royaume de Dieu continuellement à investir de ce que nous portons de meilleur, à même nos drames. Le maître est parti en voyage, comme pour nous laisser toute la place, toutes les initiatives pour que la vigne produise du fruit. Et par ce geste, cette distance, il manifeste qu’il nous fait entièrement confiance pour que nous puissions habiter et d’une certaine façon construire le Royaume toujours à venir. C’est un immense don. Qu’en faisons-nous aujourd’hui, dans nos vies quotidiennes, dans notre travail, dans nos relations qui sont parfois trop marquées d’exclusions. Dieu n’est-il pas un absent toujours présent! Et cet espace ouvert, ce Royaume présent et à venir, il ne nous appartient pas mais on est appelé à le souhaiter à l’appeler dans la vigilance de tous les instants. Ce qui devrait marquer l’ouverture et la qualité de nos relations entre nous et dans la société. Qu’apportons-nous de significatif comme croyants et croyantes dans l’aventure de notre société?

Nos assemblées dominicales peuvent ressembler à un vignoble : on souhaite bien travailler ensemble à la venue du Royaume. Le partage du vin et du pain en mémoire de Lui nous rappelle cette solidarité qui fait la vie et l’espérance, cette vie donnée, cette espérance, tel un cadeau « tombé du ciel ». Ce geste du Royaume présent et à venir nous renvoie dans la  vie et dans le travail de la vigne, qui doit être le lieu de nos pratiques de solidarité. La parabole nous le redit; le souvenir du geste de Jésus au soir de la Cène nous y invite…


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