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24e dimanche ordinaire A

14 septembre 2008

Pardonner encore et encore…

Guy Lapointe

Guy Lapointe


Matthieu 18, 21-35


 C’est le cas de le dire : on n’y va pas de main morte dans cette parabole… Une question très précise de Pierre, une longue réponse de Jésus. Une parabole, dans une mise en scène à la fois cruelle et douce, qui nous place au cœur du défi de nos vies. Apprendre à pardonner, ce n’est pas facile; bien des intérêts sont en jeu comme on peut le voir dans la parabole. Pardonner n’est-ce pas refuser que le mal l’emporte en nous et de mettre tout en œuvre pour que la rancune arrête d’empoisonner nos vies?

 « Pardon » est l’un des premiers mots que nous rencontrons dans une langue. Dire « pardon » est la plus élémentaire politesse. Celle qui manque parfois dans les files d’attente, dans le métro ou au volant des voitures. Non pas seulement cette politesse qui, parce qu’elle a dit « pardon », se donne tous les droits, mais celle qui accepte de ne pas avoir le dernier mot. Quand quelqu’un nous blesse, trop souvent la première option, c’est la vengeance. « Il ou elle va me le payer… »

Pierre, en bon juif qu’il était, vit cette difficile expérience du pardon, et se demande jusqu’où il doit aller? Il tente de connaître le point de vue de Jésus sur cette question. Combien de fois fallait-il pardonner? Les rabbins de son époque demandaient à leurs disciples de pardonner à leurs femmes, à leurs enfants, à leurs frères un certain nombre de fois. Habituellement, on allait jusqu’à accepter quatre pardons. Pierre veut savoir quel est le « tarif » appliqué par Jésus. Est-il plus sévère que celui de certains rabbins qui demandaient de pardonner jusqu’à sept fois? Adressant sa question à Jésus, Pierre voulait se montrer généreux. Il allait, lui, jusqu’à affirmer qu’on devait pardonner jusqu’à sept fois?

 Mais la réponse de Jésus fait dérailler le processus. En répondant qu’il faut pardonner « soixante-dix fois sept fois » il montre clairement que ce n’est plus un simple décompte. « Soixante dix-sept fois sept fois », c’est la plénitude multipliée par la plénitude. C’est l’incalculable, parce que le pardon est sans prix. Autant dire qu’il faut toujours pardonner. N’est-ce pas une imagination de rêveur? Jésus partant de la réalité, montre que l’Évangile apporte du nouveau jusqu’au fond de l’être humain. Il vient semer sans mesure le pardon… Le pardon est une chose ordinaire, quotidienne et difficile. Une histoire de dépossession.

Jésus répond par une parabole. « Le Royaume des cieux est comparable à un roi… ». La parabole veut aider Pierre à sortir de ce système de « tarifs » et il l’invite à imiter le pardon de Dieu. Au débordement de la violence, il veut substituer le débordement de l’amour. Cet homme avait une dette énorme, sans pouvoir remettre cet argent. Alors la loi s’applique : vendre femme, enfants et tous les biens. Rien de moins et quelle horreur! C’est une parabole. On exagère. C’est aussi la vie. Mais la vie est ainsi faite que le roi se ravise devant la demande de pitié de ce serviteur. Il remet sa dette. Mais ce serviteur à qui le roi a remis sa dette n’a rien compris, rien appris de ce geste. Sitôt sorti, il reprend le même jeu; il menace un compagnon qui lui devait et c’est sans fin. Il faut alors changer d’attitude. Il est important de comprendre que la vie, que le Royaume ne se construisent pas ainsi. Cet homme n’a pas voulu « donner au suivant », pour reprendre le titre d’une émission de télévision. Il ne vit que pour lui-même. Soulagé de sa peur, il se retourne et recommence comme si rien ne s’était passé. Il a oublié… On touche de près le mal.

Que retenir de cette superbe, douce et dure parabole, qui ressemble tellement à l’Évangile? Le pardon est difficile, on le sait d’expérience. Il est pourtant indispensable pour que les forces de vie l’emportent en nous. Ce n’est pas une question de compter les fois. Le vrai pardon ne compte pas. On n’a jamais fini de pardonner et d’être pardonné. Le pardon n’est pas l’oubli, ni l’indifférence, ni la naïveté. Il est lucide. C’est un apprentissage de la vie, une attitude à développer, une ouverture à la fragilité humaine. Jésus, dans la parabole, nous dit : sortez de vous-même, apprenez le pardon. La dette est remise; reconnaissez ce que vous recevez.

Pardonner, ce n’est pas calculer, oublier, effacer, mais libérer l’avenir. Pardonner, c’est arrêter la violence, retrouver la paix, la légèreté et donc l’humanité dans ce qu’elle offre de meilleur. Il faut laisser venir le pardon…

 Ce que Jésus a tenté de dire à Pierre et aux disciples et à nous aujourd’hui c’est que « Ceux qui pardonnent sont les guérisseurs de l’humanité… » Ils arrêtent le mal à eux-mêmes. Alors qu’ils pourraient garder le poing serré, ils ouvrent des mains généreuses. La bonté prend le pas sur la souffrance et la rancune. Pardonner, c’est l’acte le plus puissant qu’il soit donné aux humains d’accomplir. Celui ou celle qui pardonne rend Dieu présent. Ceux et celles qui pardonnent rejoignent les attitudes de Jésus.

Oui, et j’aimerais vous laisser là-dessus : sans pardon, ne risque-t-on pas de vivre au passé? On n’a pas de présent et de futur. On reste avec la blessure reçue et tout passe par cette blessure. Le pardon n’est-il pas à la fois un don de Dieu et une tâche humaine? « Il y a de l’avenir dans le pardon… ».

Continuons notre réflexion soutenue par une pièce d’orgue…


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commentaires@st-albert.org


Bonjour Guy,
 
 
Magnifique homélie de dimanche dernier le 14 septembre; édifiante et accessible.
J'avais également beaucoup aimé les deux trois phrases dites en fin de célébration après l'eucharistie, je les avais trouvées percutantes et efficaces. En les écoutant je me disais que de les relire régulièrement permettrait de mieux les intégrer au quotidien. Pourrais-tu me les transmettre?
Un grand merci par avance.
 
Virginie Boelen-Dufrêne
Bonjour Virginie,
 
Un grand merci pour tes commentaires sur mon homélie.
Tu trouveras le texte de la dernière prière.
Bonne journée à vous trois!
Guy
 
Recommençons et engageons-nous
même si cela nous coûte, même s’il faut en payer le prix de notre temps et de nos efforts.
 
Recommençons pour donner le meilleur de nous-mêmes,
Avec enthousiasme et confiance,
Comme si nous ressuscitions chaque matin.
 
Recommençons pour rire et offrir
Du soleil par tous les temps,
Avec joie et amour,
Comme s’il y avait toujours de quoi se réjouir.
 
Recommençons pour transformer l’existence à même nos pardons,
Avec l’espoir du dialogue
Comme l’Évangile nous y presse.
Recommençons pour Dieu avec lui et avec tous les autres.

 

 


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