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9e Dimanche du Temps ordinaire (A)

1er juin 2008

 Faire la volonté du Père

Françoise et Denis Tesson

Françoise et Denis Tesson

Deutéronome 11, 18.26-28

Matthieu 7, 21-27

 

C’est donc la sévère conclusion du Sermon sur la montagne. Un Sermon qui avait commencé par l’annonce des Béatitudes. Imaginons la scène : les disciples exaltés entourent Jésus. Ils s’imaginent déjà, eux aussi, prononçant les discours qui soulèvent les foules, faisant fuir les démons, réalisant au nom de Jésus le miracle de distribuer le pain et le poisson en abondance… Ils entourent Jésus, ils sont à ses genoux : « Seigneur, Seigneur... ».

Une fois de plus, c’est le malentendu et les paroles de Jésus sont extrêmement dures : « Vous prétendrez avoir agi en mon nom? Moi je vous répondrai : Je ne vous ai jamais connus, écartez-vous de moi, vous qui faites le mal » et, quand Matthieu rédigera son évangile, il aura sans doute lui aussi en tête, parmi l’église naissante, de ces prédicateurs convaincants et de ces croyants charismatiques pour lesquels ces paroles de Jésus ont, cinquante ans plus tard, toute leur pertinence.

L’important, a rappelé Jésus pendant toute sa vie publique, n’est pas l’observation de la loi. Ce n’est pas non plus le dévouement à sa personne, ni les actes d’exception. C’est tout au long de la vie, au ras du quotidien, qu’il faut faire la volonté du Père et faire advenir sa justice. Il ne suffit pas d’entendre, d’adhérer, de prêcher : « toute personne qui écoute ce que je vous dis là sans le mettre en pratique est comparable à l’insensé qui a bâti sa maison sur le sable… »


‘Faire la volonté du Père…’ voilà le roc sur lequel construire sa vie.

Curieuse image que celle du roc sur lequel la personne prévoyante a choisi de construire sa maison, comme s’il s’agissait d’un choix fondateur, initial et définitif, comme s’il était facile de reconnaître cette volonté du Père, comme si elle ne faisait pas l’objet d’une incessante interrogation.

N’est-elle pas plutôt comme le rocher que le naufragé prend comme repère dans la tempête? De très loin, cela semble un havre sûr et le bon cap à tenir. De près, le roc est à la fois glissant et plein d’aspérités.

De même, dans les situations concrètes de nos vies, il me semble que la volonté du Père est indiscernable, fuyante.


Même pour Jésus, il n’a pas été évident de trouver quelle était la volonté du Père. Pétri de traditions et de règles dans un milieu dominé par le clergé, c’est par l’ascèse et la prière que Jésus a inventé une façon d’être fidèle, par un prodigieux effort de liberté. Non, il ne serait pas le libérateur d’Israël, non, il ne prendrait pas parti dans les conflits communautaristes ou les luttes de classes qui déchiraient son peuple. Ses seuls ennemis seraient ceux qui prétendent dicter aux humains ce que Dieu exige.

Pour les dirigeants religieux, et avec le même souci de faire la volonté de Dieu, la stratégie a trop souvent été de proposer, voire d’imposer à la communauté, une série de règles et d’interdits, d’encadrer la prise de parole, de construire des temples et des institutions. J’aime à ce propos ces mots que Rabelais, l’un des premiers humanistes, fait dire à Panurge : « Les beaux bâtisseurs de pierres mortes ne sont pas inscrits dans mon livre de vie. Je ne bâtis que pierres vives, ce sont hommes. »

Devenir ces pierres vives, c’est à quoi nous invite le Fils de l’homme. Il nous invite à faire à sa suite l’effort de liberté pour découvrir, dans l’humilité de nos défis quotidiens et armés de nos propres talents, comment accomplir cette volonté du Père. De telles pierres vives, de ces personnes exceptionnelles et discrètes qui vivent ainsi le message évangélique, nous en avons dans notre entourage, dans nos familles, dans notre communauté.


Faire la volonté du Père… ce n’est pas un travail de contemplatif et c’est loin d’être une science exacte. Au contraire, c’est par l’écoute constante et en mobilisant toutes les personnes de bonne volonté au-delà de leurs traditions religieuses que nous pourrons découvrir les chemins de justice.

Ainsi, j’ai été récemment très impressionnée par la démarche qui vient d’avoir lieu au Mouvement ATD Quart Monde entre des femmes et des hommes de différents pays, de différentes croyances ou non croyants, qui se sont écoutés et ont cherché ensemble des chemins nouveaux pour affronter les problèmes brûlants liés à l’extrême pauvreté.


Mais cette écoute active est-elle possible quand on croit faire partie du peuple élu par Dieu et dépositaire de ses commandements? Ne pourrions-nous pas lire autrement l’extrait du Deutéronome de ce matin : « les commandements que je vous donne, mettez-les dans votre cœur, dans votre âme… suivez le chemin que vous connaissez » dit Moïse. N’est-ce pas une autre façon de dire : « la volonté du Seigneur, cherchez-la au fond de votre cœur, de votre âme; c’est en vous que vous pouvez la trouver »? Elle est en chaque humain, de toute éternité et à jamais.

Faire la volonté du Père, ce pourrait être d’obéir à un maître exigeant, soi-même, en mobilisant toutes nos capacités, notre intelligence, notre énergie et notre compassion, en tentant, là où nous amènent les hasards de la vie, d’aménager le présent pour que la demeure humaine soit un peu plus accueillante à la vie.

Ce pourrait être aussi de savoir reconnaître chez les autres, au-delà des différences de religion et de culture, des acteurs de changement habités du même désir d’accomplir la volonté du Père, des acteurs avec qui des alliances sont possibles pour réaliser les petites choses qui font exister le Royaume de Dieu parmi nous.


Est-ce une interprétation trop souple, trop ‘accommodante’ des exigences évangéliques? Pour ma part, je ne crois pas mieux mériter d’entrer dans le Royaume des Cieux que nos enfants devenus incroyants. Leur quête de justice ne fait pas référence à la ‘volonté du Père’, mais elle vaut bien la mienne.

Reste de leur éducation chrétienne? J’espère au moins qu’ils ont quelques souvenirs qui leur permettraient de penser que, quelquefois, leurs parents ou ceux qu’ils ont connus à St-Albert ont mis en pratique ce qu’ils ont enseigné. Quelques fragments de mémoire qui seraient pour eux roc plus que sable, pour l’avenir du Monde... pour le Royaume qui vient.


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