Notre temple à Montréal Communauté chrétienne
Saint-Albert-Le-Grand de Montréal
Contrôler votre inscription au registre de la Communauté

La Pentecôte 2008

11 mai 2008

 De peur et de souffle…

Guy Lapointe

Guy Lapointe
Actes 2, 1-11

Jn 20, 19-23

                                                 

Il en va des événements qui disent les origines comme des photos de famille. Plus le temps passe, moins on reconnaît les détails, et plus on porte dessus un regard distancié. Ainsi pour les récits de la Pentecôte et leur héritage. Deux récits pour nous parler de l’Esprit, tels des photos de famille. Le récit des Actes est tout en bruits, tout en couleurs, de feu, et de langues, d’enthousiasme communicatif, un bruit qui devient de plus en plus fort avec la rumeur. Cet Esprit, c’est un souffle nouveau et fort qui ouvre  les disciples à d’autres dimensions de la vie.

Le récit rapporté par l’Évangéliste Jean, est tout en discrétion, portes closes, murmure d’un souffle léger et, par deux fois, souhait de paix. Pas n’importe quelle paix, mais « ma paix » dit Jésus. Ce récit veut les déverrouiller, les sortir  de leur peur de l’autre. Ce sont les rescapés d’une aventure d’espérance vécue pendant quelques années avec Jésus. Sa mort avait tout anéanti.   

Comme eux, nous en avons besoin de cette libération, nous la souhaitons, même si  nous nous reconnaissons plus ou moins dans ces descriptions si imagées. Mais admettons que, comme dans les récits que nous venons d’entendre, nous sommes de peur et de souffle. Ce qui compte, ce ne sont pas les manifestations extérieures, c’est la Pentecôte intérieure qui refait, qui donne des ailes aux disciples pour bâtir l’unité dans la diversité, la communion dans la divergence. Nous sommes, nous,  en un temps d’Église où nous avons besoin de retrouver du souffle, de retrouver le goût et le courage, avec une saine  humilité, de ne plus taire ce que nous sommes, et même, quand l’occasion est propice, de dire notre foi. La Pentecôte est bienvenue…

Ces récits nous rappellent que Jésus ne nous a pas laissés orphelins. « Je pars, mais je vais vous envoyer mon Esprit ». Il veut dire son Esprit de liberté et de paix; paix qui dit aussi le pardon de nous-même d’abord et des autres et surtout la confiance. Il nous a laissé son Esprit. Ce n’est pas une abstraction. Rappelons-nous ce soir du Jeudi : ce pain et ce vin c’est mon corps :« Prenez et partagez » nous a-t-il dit. C’est maintenant  notre responsabilité. Nous les partageons dans son souvenir, dans son Esprit. N’est-ce pas à travers ce geste simple et fort qu’on reconnaît, qu’on sent l’Esprit de Dieu en nous? Les verrous sont à l’intérieur de nous. Les murs et les blindages sont d’abord en nous. La peur dévore à l’intérieur, elle épuise l’énergie, elle stérilise, elle aveugle. Nous connaissons bien ces choses.

Parlant de la peur… Dans un de ses ouvrages, Timothy Radcliffe, un dominicain que tout le monde connaît, je crois, écrivait ceci : « Pendant mes neufs années de maître de l’Ordre, j’ai voyagé autour du monde dans bien des endroits  dangereux. J’ai vu la guerre civile et le génocide en Afrique, des milliers de lépreux, les signes d’une violence sans limites. Mais quand je suis revenu en occident, j’ai vu des gens qui semblaient plus effrayés que partout ailleurs. » (Les sept dernières paroles du Christ, Paris, Cerf, 2004, p.83.)

Il ne s’agit pas de nier la peur, elle fait partie de notre humanité. Le défi n’est pas d’ignore la peur, mais de ne pas nous y laisser enfermer. Oui, nos peurs peuvent nous paralyser. Et si nous n’y prenons pas garde, elles peuvent nous « verrouiller » sur nous-mêmes. Aux disciples anxieux, Jésus veut d’abord donner la paix. Ce n’est pas une paix ordinaire. La paix c’est l’accueil de Dieu, l’accord avec Dieu. C’est habiter déjà le monde réconcilié, lumineux, enfin humain. Jésus répète le vœu de paix comme pour l’enraciner au plus profond en eux. Il veut leur dire la parole qui ouvre l’avenir : « Je vous envoie ». Une poussée qui surgit du cœur mystérieux de l’univers.

L’Esprit incite au pardon les uns les autres. Les disciples vont dehors, libérés de leur peur. Serait-il en train de recommencer le monde, l’homme, de le créer à nouveau, un nouveau souffle? « Recevez l’Esprit Saint. » Oui, il donne à ces hommes de refaire sans cesse le monde. Tous différents, mais en recherche d’un même esprit. De même qu’ici à St-Albert, on est tellement différents et pourtant, il me semble que, à quelque part, on se comprend, on cherche ensemble.

N’y a-t-il pas une peur des chrétiens au Québec? Peut-être parce qu’on aurait du mal à pardonner à se pardonner; à nous reconnaître sur les vieilles photos d’un christianisme passé. On est invité à nous reconstruire avec des chrétiens différents dans une culture qui évolue rapidement, tout comme nous somme différents les uns des autres, ici à St-Albert, et que nous arrivons, j’en suis sûr à nous parler, à faire quelque chose ensemble, à bâtir et à habiter notre foi dans notre monde.  J’ose croire que nous n’habitons plus une religion de peur et d’exclusion, mais une foi qui ouvre des portes à l’humanité au souvenir de celle de Jésus, humanité que nous vivons et que nous tentons de construire chez-nous.

La paix, c’est un parcours… En préparant cette célébration quelqu’un a dit : « Le monde est foutu, mais la vie est belle », faisant allusion à ce film La vita e bella  dans lequel un père essaie de rendre la vie belle à un enfant dans un univers infernal. La vie, la paix, c’est la confiance, le souffle dans ce parcours; on est pas seul. C’est la persévérance du souffle.

Je termine avec une citation du poète Gaston Miron. Et je la crois fort appropriée pour le souffle de la Pentecôte et notre situation présente en Église au Québec : « Il n’est pas question de laisser tomber notre espérance. » Il parlait certainement  de tous nos espoirs. Pour ma part, je nous parle aussi de l’espérance chrétienne, l’espérance de l’Évangile.

 

 


Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal
Accueil    Homélies    Organisation    Événements    Célébrations    Inscription
Plan du site    En haut