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18e Dimanche du temps ordinaire

5 août 2007

Yvon D. Gélinas
Yvon D. Gélinas
Ecclésisaste 1, 2; 2, 21-23
Luc 12, 13-21

La vie n’est que vapeur, buée…

 

Tout est vanité, nous dit Qohélet, l’auteur du Livre de l’Ecclésiaste. Une phrase bien souvent reprise par bien du monde en bien des situations. Tout est vanité. Et pour bien saisir toute l’étendue de cette observation d’un sage désabusé, d’un sage qui a beaucoup vécu, il est utile de redonner au mot vanité le sens qu’il avait pour Qohélet : vapeur, buée. Tout est buée. Une buée, une image floue, une apparence furtive tout autant que fugitive. La vie est vapeur, buée presque aussitôt effacée qu’apparue. L’expression d’un monde vide, sans avenir, sans espérance. Et l’on reprend ce texte en univers chrétien!

Vite, allons à l’Évangile! Oublions cet univers trop étroit de Qohélet. L’Évangile est Bonne Nouvelle, vent de fraîcheur, de renouveau… Qu’est-ce qu’on y trouve ce matin? Cette parabole où Dieu — Dieu le créateur, Dieu qui disait de toute son œuvre : « Cela est bien fait, cela est bon » — cette parabole où Dieu déclare à l’homme riche, l’homme qui a réussi et pense à se préparer des années heureuses : Tu es fou; cette nuit même on te redemande ta vie. Ce que tu auras mis de côté, qui l’aura? La vie est vite passée. Tout est apparence. Tout est buée. Vanité des vanités.

Belle réflexion pour un dimanche d’août, un dimanche de plein été avec du soleil et déjà des récoltes, où tout semble inviter à considérer un bonheur possible, un avenir. Reprenons nos textes et cherchons à aller plus loin qu’une rapide lecture de quelques extraits.

Vous savez comment Qohélet termine son Livre de l’Ecclésiaste. Par un très beau poème qui dit l’amour de la vie, et qui exprime — comme en filigrane — le désir que cette vie ne s’achève pas. Il invite à profiter des beaux jours avant que ne viennent les jours dont on dira : Je ne les aime pas (12, 1). Et en quels termes cette évocation de la vie!

Et l’amandier est en fleur,
et la sauterelle est pesante,
et le câprier s’épanouit.
(12, 5)

Et en contraste, le regret de laisser tout cela :

Profite du bon temps
avant que la jarre se casse à la fontaine,
 que la poulie se rompe au puits
et que la poussière retourne à la terre
et le souffle à Dieu qui l’a donnée.
(12, 6-7)

Et la suite du texte de l’Évangile de Luc :

Sois sans crainte petit troupeau, car votre Père s’est complu à vous donner le Royaume. Là où est votre trésor, là aussi sera votre cœur. (12, 32-34)

Tout est vanité tout est buée et vapeur. Mais ils sont quand même bien beaux ces matins où se lève une brume légère, où toutes les choses, aperçues comme à travers un voile, semblent pleines d’inconnu à découvrir, de bonheur à faire s’épanouir. Je confesse, avec humilité, qu’en lisant les textes de ce matin, m’est venue et revenue à l’esprit la phrase — si souvent citée qu’elle est devenue banale — de Malraux : Une vie ne vaut rien mais rien ne vaut une vie. Qohélet, l’Évangile nous présentent des réflexions sur la vie, sa brièveté, les scandales qu’elle comporte. Des réflexions, ou désabusées, ou trop rudement réalistes.

Ajoutons encore un petit verset de Qohélet : Les paroles des sages sont comme des aiguillons (12, 11). Justement, les textes de ce matin sont de ces aiguillons qui nous amènent à nous demander : Quel sens, quelle valeur, quel prix je veux donner à ma vie? Et ensuite : Comment je veux la vivre cette vie trop brève? Et puis quelle dimension a-t-elle vraiment la vie?

Il me semble que le message que l’Évangile veut nous faire entendre — et retenir — tient en ces quelques mots : La vie d’un homme, fut-il dans l’abondance, ne dépend pas de ses richesses. Elle ne tient pas la vie dans les biens, de quelques sortes qu’ils soient : biens matériels, culturels, spirituels même, dans ces biens que l’on amasse. Elle tient dans l’usage que l’on fait des biens. Biens que l’on partage. Dans lesquels on puise les courages qu’il nous faut. Biens qui dictent nos attitudes avec et envers les autres.

Et puis, la vie, quelle est sa portée, sa dimension? On la restreint si souvent à l’immédiat, au visible, à ce que l’on peut rejoindre et posséder. Ou bien, à l’autre extrême, à une vie à venir, pour demain, dans l’au-delà. Une vie qui ne sera plus jamais vanité et qui consolera des scandales rencontrés en ce monde.

L’Évangile de ce jour? Un aiguillon qui nous provoque à reconsidérer la vie de demain, oui, mais à la lumière de notre vie de maintenant, celle que l’on prend entre nos mains, que l’on construit, oriente et rend valable malgré toutes les vanités, tous les obstacles, tous les coups durs. La vie que l’on partage, que l’on donne. Comme Dieu nous partage et nous donne. La vie qui est désir de plus, de mieux.

Nous ne sommes pas privés d’espérance comme Qohélet qui ne voyait que les nuages qui reviennent pour obscurcir le soleil, qui n’entendait que les chansons qui se taisent, qui redoutait les montées et avait des frayeurs en chemin.(12, 2, 4, 5)

Il y a pour nous, avec nous, celui qui avant nous a marché le chemin de la vie, qui a rendu sa vie quand on la lui a demandée et qui est entré dans la vie du Royaume. Pour nous, à cause de lui, rien ne peut plus être que vanité ou buée. Tout a du poids, de la valeur, du sens, de l’avenir.

Ton cœur est là où tu mets ton trésor.


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