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Ascension

20 mai 2007

« Condamnés » à croire autrement

Guy Lapointe

Guy Lapointe

Luc 24, 46-53
Actes 1, 1-11

                                                                                    

«  Au cours d’un repas qu’il prenait avec eux… Ils le virent s’élever et disparaître à leurs yeux… » Que ce moment du départ ou de l’Ascension de Jésus ait eu lieu quarante jours après Pâques ou le soir même de Pâques, cela n’a pas tellement d’importance. Rappelons-nous que les évangiles ne sont pas des récits historiques. Et dans la façon d’évoquer l’Ascension de Jésus, Luc utilise une image forte, celle de l’emportement, pour marquer une séparation, comme on en invente tant pour exprimer ce qu’on a de la difficulté à dire. Une chose est certaine : Luc veut  dire que l’image de l’Ascension signifie  la fin d’un type d’expérience de foi des disciples avec Jésus. Ils auront désormais un deuil à vivre. L'ascension

Une amie d’un certain âge me disait que la fête de l’Ascension avait été pendant longtemps, pour elle, une fête triste. C’était la fête de la séparation… Depuis notre naissance, jusqu’à notre mort, nos vies sont faites pour une bonne part de séparations, heureuses ou moins heureuses. Ce sont des deuils. On doit les assumer pour vivre. Je me souviens qu’à l’âge de 12 ans, quand j’ai quitté la famille pour le collège, ce fut une séparation difficile,  mais nécessaire. Un vrai deuil, un deuil nécessaire pour construire ma vie.

Le départ de Jésus — et la mise en scène deux fois plutôt qu’une chez Luc — était nécessaire. Dans les milieux de santé, pour parler de certaines maladies, ou d’un handicap qui fait qu’on ne peut plus vivre comme avant, on parlera d’un deuil blanc. C’est-à-dire, ce n’est pas la mort, mais l’abandon d’une certaine situation, où on perd quelque chose et un apprentissage à vivre, mais autrement. Les disciples vivent le deuil de la présence physique de Jésus;  ils ont  entendu sa voix; ils ont pu le toucher. C’est une  séparation, oui, mais c’est surtout un passage, un devenir. Dans ce passage à faire, on y entre souvent sans l’avoir voulu, sans toujours avoir été préparé.

Pour les disciples, suivre Jésus, a été, avec des moments de grandes joies et de grandes peines, un apprentissage à la vie. Ils avaient découvert cet homme, ils avaient découvert Dieu aussi et pour une large part, je l’espère, ils s’étaient découverts eux-mêmes. Le départ de Jésus représente pour eux un immense défi pour leur vie et leur vie de foi. Ils font  l’apprentissage de suivre Jésus autrement. Il est vivant, oui, il l’a manifesté. Mais maintenant c’est à eux, comme c’est à nous aujourd’hui de le montrer, de témoigner, d’en saisir les enjeux dans notre façon d’être, de vivre et de nous engager. C’est à nous de découvrir et de faire découvrir qu’est-ce que cela signifie qu’il soit vivant, qu’il est ressuscité. Les disciples sont  « condamnés » à croire  autrement.

À cet égard, il y a un changement de responsabilité, comme un passage à effecteur dans la façon de vivre désormais leur foi. Jésus parti, dans une sorte d’ascension symbolique, les disciples sont maintenant responsables de la qualité de foi et d’engagement, poussés qu’ils sont par le souvenir de Jésus. Prise de conscience d’une responsabilité dans la foi et dans la présence — absence de Jésus.

C’est aussi un changement de type de foi. Les disciples n’auront plus de rappel régulier — d’apparition —  de ce Jésus vivant; ils doivent se faire à l’idée. Mais comment donc désormais sera-t-il présent ce grand absent? Il leur a dit « quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux ». Il est au milieu de nous aujourd’hui dans cette assemblée, parce que nous sommes là. Voilà notre responsabilité nouvelle. N’attendons plus une présence magique de Jésus; elle dépend de nous. Je vous le dit souvent et je vous répéterai encore mille fois cette parole d’Augustin: « Vous être le Corps du Christ; recevez ce que vous êtres ».

« Je serai avec vous jusqu’à la fin des temps ». Il est l’un de nous. Et la foi, c’est de toujours  tenter de jouer l’avenir du monde par ce qu’il y a de meilleur dans l’humanité. Nous avons depuis ce jour une responsabilité : se dire qu’à cause de Jésus vivant, à cause de Jésus retourné au Père, l’avenir du monde est ouvert. Aux disciples, à nous, de le manifester dans leur vie, dans leur quotidien. La foi est un deuil à faire; une perte de l’autre, en même temps qu’une mise en recherche de l’autre et une manifestation de vie à reconquérir constamment.

On est totalement responsable, grâce à l’Esprit qui nous permet de rester vigilant, d’avoir du souffle dans  le monde à bâtir et à venir. En ce sens, c’est notre propre ascension que nous célébrons. Alors posons–nous la question : comme croyants et croyantes, sommes-nous des êtres de résurrection et d’ascension?

Nous sommes des êtres d’humanité qui ont à construire le monde dans la mémoire de ce Jésus. En sommes-nous conscients? Oui, la foi est une perte de la possession de l’autre, un deuil; la foi est cette ouverture pour vivre l’humanité autrement, pour veiller à son avenir, faire que tout le monde vive  dans un esprit d’ouverture et de vie et non de mort. Et quand la mort arrive, c’est une mort qui peut dire merci à la vie.

Au moment où il se sépara d’eux, Il les bénit… Être capable de bénir Dieu et le monde, cela est une ouverture, cela donne des moments de joie et de bonheur… C’est un départ, celui de Jésus. Il est entré dans la dimension de Dieu. Mais c’est aussi notre propre ascension que nous fêtons… On est comme tiré en haut tout en restant les pieds sur terre. On est  tiré en avant; comme des gens en marche C’est un immense défi…   


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