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Texte de ressourcement

« Je me souviens avoir lu quelque part, chez Maître Eckart, qu'il nous faut même dépasser le mot « Dieu ». C'est un défi que seuls les mystiques peuvent proposer!

Et personnellement j'aime ce défi.

J'arrive à un moment de ma vie où je dis encore Dieu, mais sans aucune précision à son sujet; chaque fois que je dis Dieu ou soupire ce nom dans mon intimité, chaque fois, c’est le même contenu et en même temps quelque chose de différent des fois précédentes. Je dis Dieu sans lui attribuer une identité particulière. Je le dis comme une respiration, comme une force, un soupir, un cri devant des situations intolérables, devant la violence grandissante, devant mon propre désarroi. Je dis Dieu comme espoir, comme soulagement, comme désir de liberté, comme joie, comme amour. Mais aussi, je me tais quand je le peux… Je ne dis rien, j'accueille ce qui est et essaye de faire quelque chose.

Dieu est le mot le plus flou qu'on puisse prononcer aujourd'hui. C'est un concept vide comme je disais plus haut. Mais aussi, c'est le mot le plus utilisé par ceux qui ont de grandes certitudes, Dieu est un des mots le plus subjectif qui soit. Et pourtant, on le dit comme si c'était une « chose » évidente, objective pour tous et toutes. Et on s'approprie le mot Dieu pour affermir n'importe quel pouvoir et surtout les pouvoirs despotiques.

Pour moi à nouveau ce mot se rapproche du mot liberté. Dieu et la liberté ont peuplé les pouvoirs politiques et les pouvoirs religieux. Au nom de Dieu ou au nom de la liberté, nous avons fait l'histoire de l'occident et de l'orient et nous avons fait notre propre histoire personnelle.

Ah si l'on pouvait dire Dieu dans le silence de notre cœur, dire Dieu comme le Oui ou le Non de la vie, dire Dieu comme le Mystère qui traverse tout!

Mais aussi, ne pas dire Dieu, se taire et seulement vivre, en essayant de créer des relations de justice et de droiture. Voilà un peu où j'en suis aujourd'hui. »

Ivone Gebara
Proposé par François Dufour


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