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Communauté chrétienne
Saint-Albert-Le-Grand de Montréal |
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Saint-Albert, c’est…
La Communauté chrétienne Saint-Albert-le-Grand…
Ce nom évoque pour celles et ceux qui la composent, environ 300 personnes,
une expérience spirituelle qui dure maintenant depuis une quarantaine
d’années. Ce nom évoque autant de visages. Des visages
et des noms, dont certains ont fait un bout de chemin et ont emprunté d’autres
routes. « Saint-Albert », ce sont des liens, un pari,
une audace. C’est un risque. C’est toujours à refaire, à refonder,
en quelque sorte, à recommencer.
« Saint-Albert », ce sont des craintes permanentes :
celle du repli, celle de l’élitisme, celle de la suffisance,
celle de la routine dans la créativité. Une Communauté non
territoriale, de libre appartenance, de choix, pour plusieurs personnes qui
y viennent, c’est une sorte de dernier recours pour leur pratique liturgique
chrétienne. À un certain niveau, tout le monde est de passage,
personne n’a planté définitivement sa tente… comme
le faisaient autrefois et le font encore certaines assemblées dominicales
liées, à titre de communauté, au territoire paroissial.
Ce qui dit à la fois la force de la communauté et sa fragilité.
« Saint-Albert », ce sont des événements
personnels, familiaux, communautaires, tristes ou joyeux, sombres et lumineux
qui sont soulignés dans les célébrations dominicales.
Une communauté toujours dispersée aux quatre coins du Grand
Montréal et plus loin encore… et qui se refait de dimanche
en dimanche. Ce qui fait sa fragilité, sa force et sa singularité.
Je dis bien une assemblée liturgique, puisque c’est de
cette assemblée qu’une communauté s’est constituée
dans l’élan de Vatican II. Ce sont des laïcs qui venaient
dans les années 60 « assister » à la
messe des Dominicains et qui ont pris au sérieux cette affirmation
de la Constitution sur la Liturgie : « L’assemblée
est le sujet premier de la liturgie ». Ces personnes ont désiré,
demandé et mis en oeuvre une « participation pleine,
consciente et active » (SC 14) dans la façon de penser
et de participer aux assemblées liturgiques dominicales et à d’autres
célébrations, évitant ainsi que l’expérience
liturgique et l’organisation du reste de la vie ne soient la propriété du
seul prêtre, tout dominicain soit-il… On sait que la communauté dominicaine
d’alors a eu du mal à bien entendre les revendications de
ces laïcs et un long malentendu s’est installé – et
ne nous cachons pas la réalité, puisque nous sommes entre
Dominicains – avec des moments parfois fort tumultueux.
Quelques dimensions
que j’aimerais souligner et qui parlent
de la singularité de cette communauté :
a) L’implication des laïcs à tous les niveaux
de la vie de cette communauté. Ce qui n’empêche
pas parfois la naissance de conflits. C’est loin d’être
la communauté eschatologique… On
essaie de construire sur l’acceptation de la diversité des
membres et de leurs différences. Jusqu’à maintenant
cette attitude semble bien réussir. L’espace est ouvert,
large, à l’image
de l’Évangile. Plusieurs personnes me l’ont dit :
quelle que soit leur situation de vie, elles ne se sentent pas jugées.
b)
L’importance
accordée à l’homélie, pour
favoriser une parole intelligente de plus en plus partagée avec
des laïcs. Plus globalement, l’importance accordée à la
liturgie de la Parole, à la dimension d’Action de grâces, à la
musique, au chant, au silence et au geste de partage du pain et de la
coupe en mémoire de Lui.
c) Dans cette assemblée, on trouve aussi des
chrétiens qui
proviennent de diverses confessions chrétiennes. L’espace
est ouvert et chaque personne se situe à sa façon.
d) Une assemblée
consciente des enjeux de transmission autant pour les enfants que pour
les adultes.
e) Des Dominicains, autres que ceux de la Communauté St-Jean
ont présidé ou président cette assemblée :
Benoit Lacroix, Yvon Gélinas, Richard Guimond. Sur ce point, une
remarque : qu’on ait raison ou pas, il nous paraît important
que les présidents ne soient pas parachutés sans une bonne
expérience de cette assemblée. Il est important de la fréquenter…
L’âge de la communauté suit la tendance démographique
du Québec. Mais depuis un ou deux ans, on remarque qu’il y a
davantage d’enfants, davantage de jeunes couples.
La liturgie est
toujours en profonde créativité, en même
temps qu’elle est ancrée dans la tradition. Elle est mise en
oeuvre par des équipes qui ne font pas que distribuer des tâches,
mais qui pensent la mise en scène de la liturgie. Soit dit en passant,
on n’a jamais eu de mise en garde des autorités diocésaines,
mais plutôt une reconnaissance et une fierté exprimées
par le Cardinal Jean-Claude Turcotte lors du 25e anniversaire de Saint-Albert à l’occasion
de sa rencontre avec la communauté à l’automne 2006.
Et
comme je travaille à l’Office national de liturgie, je suis
en contact avec les évêques membres de la Commission épiscopale
de liturgie. Ils connaissent bien l’orientation donnée à notre
assemblée. Je sens, de leur part, un respect pour le travail qui se
fait et la qualité de vie de cette communauté.
Voilà. Je n’ai pas fait un tour complet. Bien d’autres
dimensions et questions auraient pu être évoquées. Il
serait important que l’histoire de cette assemblée-communauté soit
mise par écrit. Pour terminer, je vous dis une conviction. On connaît
le mouvement de restructuration des communautés territoriales en unités
pastorales. Restructuration nécessaire, soit dit en passant, mais
ce mouvement connait déjà d’énormes limites. Ma
conviction, c’est que le renouveau des réseaux chrétiens,
la qualité de leurs engagements au nom de l’Évangile,
passera par la découverte d’une liturgie intelligente, poétique,
intériorisante, significative et surtout, par des célébrations
qui favorisent la découverte du sens d’une parole évangélique,
plus poétique qu’enseignante. Ce renouveau de l’assemblée
liturgique refaçonnera le sens de la communauté, à la
condition que les responsables eux-mêmes se remettent à croire à l’assemblée
liturgique et y travaillent. Le présent et l’avenir de notre Église
se jouent, pour une bonne part, à retrouver cette intelligence et
cette pratique…
Joyeuses Pâques à vous tous et toutes!
Guy
Lapointe
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