Cinquante jours après Pâques, l’Église propose à notre célébration la belle fête de la Pentecôte. Aux apôtres qui essaient toujours de comprendre le mystère de la Résurrection, Jésus envoie son Esprit pour leur permettre d’intérioriser ce qui s’est passé et les envoyer proclamer cette Bonne Nouvelle. Cet Esprit leur apportera la lumière, la compréhension, le dynamisme et même la fougue pour poursuivre le ministère de Jésus. Pour nous aider à entrer dans ce mystère, je vous propose de commencer par comparer ce qu’on célébrait dans la Pentecôte juive et ce qu’on célèbre dans la Pentecôte chrétienne.
Car la fête de la Pentecôte n’est pas une innovation chrétienne. Elle est la reprise, christianisée, d’une ancienne fête juive. En effet, lors de la Pentecôte, les juifs célèbrent le don de la Loi à Moïse sur le Sinaï. Vous vous rappelez le contexte du récit, surtout depuis qu’on en a fait des films. Moïse se rend au sommet de la montagne. Dieu est dans une nuée. Il y a des éclairs et du tonnerre. Il y a aussi du feu. Dans la version cinématographique, on voit même un éclair qui sort de la nuée et qui grave les dix commandements sur deux tables de pierre. C’est tout ce qu’il y a de plus impressionnant. Mais, il n’empêche, tout cela part d’un fait capital : le don de la Loi au peuple juif. Car, pour les juifs, la Loi désigne la présence de Dieu à son peuple.
Sant être aussi spectaculaire, le contexte de la venue de l’Esprit Saint sur les apôtres fait quand même écho à certains éléments du récit du don de la Loi à Moïse. On n’est pas sur une montagne, il n’y a pas de nuée, mais il est question d’un bruit qui survient comme un violent coup de vent. Il y a aussi du feu mais qui, cette fois, se partage en langues sur tous les assistants : Tous furent remplis de l’Esprit Saint. On est donc bien devant une reprise de l’événement raconté dans le Premier Testament : une nouvelle étape de la présence de Dieu à son peuple, non plus par la Loi mais par l’Esprit de Dieu lui-même.
En effet, la Pentecôte chrétienne célèbre l’avènement du nouveau peuple de Dieu. Non plus régi par une loi extérieure aux humains. Mais par l’Esprit de Dieu lui-même, présent au plus profond des esprits et des cœurs. L’Esprit qui permet d’intérioriser l’action pascale, de dire Jésus vivant au milieu de nous et de continuer à rassembler, réconcilier, guider. On voit aussi que ce n’est pas n’importe quel Esprit qui est envoyé sur les apôtres mais bien l’Esprit de Jésus Christ qui nous relance dans la même mission.
Comment comprend-on l’Esprit de Jésus? Par l’Évangile. L’Évangile n’est pas un texte du passé qui transmettrait une réalité morte. La transmission renvoie plutôt à un processus dynamique qui cherche à rendre l’événement Jésus Christ vivant, signifiant et actif pour nos contemporains. C’est un processus créatif, guidé par l’Esprit, qui nous donne de trouver les mots et les gestes d’aujourd’hui pour incarner l’Évangile dans notre monde. Il ne s’agit pas simplement de répéter ce qui s’est fait ou dit dans le passé.
Il s’agit de faire du neuf tout en était fidèle à ce que nous ont transmis les premiers chrétiens. J’ai encore beaucoup de choses à vous dire mais, pour l’instant, vous ne pouvez pas les porter. Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière. C’est justement cet Esprit de vérité qui nous inspire les gestes et les mots qui conviennent pour actualiser la Bonne Nouvelle aujourd’hui. En nous rendant disponible à l’Esprit nous entrons dans son dynamisme. Si l’Église oublie l’Esprit, elle risque de figer la transmission de l’Évangile.
On comprend donc le rôle irremplaçable de l’Esprit dans la compréhension du dessein de Dieu. La pédagogie de la Loi se tenait en extériorité par rapport aux croyants, avec toutes les dérives possibles. L’Esprit agit à l’intérieur de nous, nous convertit et nous donne de trouver les mots et les actions adaptées à aujourd’hui. En lisant l’Évangile avec des questions actuelles, nous découvrons des possibilités que les croyants du passé ne pouvaient pas percevoir. Le texte de l’Évangile ne clôt donc pas notre connaissance de Jésus.
Il est plutôt le point de départ d’un chemin de connaissance dont l’Esprit est le guide et la lumière. Avec l’Esprit nous n’aurons jamais fini de parcourir cette route à la suite de Jésus. Notre époque présente une multitude de questions et de défis nouveaux. Nous en mesurons l’ampleur et l’importance à tous les jours. Prions pour que nos communautés, notre Église, retrouve une nouvelle Pentecôte, particulièrement à l’occasion de la démarche synodale que nous vivons actuellement.