CCSA






Communauté chrétienne St-Albert le Grand





4e Dimanche du Temps Ordinaire

Bruno Demers

Marc 1, 21-28

Une parole qui libère

Est-ce que vous faites ce que vous dites? Est-ce que vous réussissez à tenir vos promesses à l’égard de vos enfants, de vos amis, de vos proches, de vos consœurs et confrères de travail? C’est tout un champ de considérations qu’on se trouve à ouvrir quand on soulève de telles questions. On n’y répond pas de la même façon selon les différents âges de la vie. L’expérience et la sagesse entrent en ligne de compte. C’est tout le thème de la cohérence, de la congruence, de la crédibilité. La figure de Jésus peut sans doute nous inspirer encore une fois.          
           
Déjà, les premières lignes de la Bible nous placent devant ce thème. Dans le livre de la Genèse, on trouve : Dieu dit : Que la lumière soit! Et la lumière fut. Et un peu plus loin : Dieu dit : Qu’il y ait un firmament au milieu des eaux et qu’il sépare le ciel des eaux. Et il en fut ainsi. Dieu crée par sa Parole. Sa Parole ne se limite pas qu’à des mots. Elle comprend aussi une composante d’action, d’efficacité. Elle est une force dynamique qui opère les effets voulus par Dieu. Dieu l’envoie comme un messager. Elle court. Elle fond sur les humains. Elle produit toujours ce qu’elle accomplit. Elle reste active dans l’univers et dans l’histoire.         
           
On en a une autre illustration avec Moïse. Moïse que Dieu a désigné comme prophète dans la première lecture d’aujourd’hui. Tout de suite après l’épisode du Buisson ardent, on nous rapporte que Dieu s’adresse à Moïse : Le Seigneur dit : Oui je connais les souffrances de mon peuple. Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter vers un pays ruisselant de lait et de miel. Dieu dit quelque chose et il le fait. Dieu conduit son peuple selon sa Parole. Puis vient Jésus qui se retrouve avec ses disciples dans la synagogue de Capharnaüm où, à chaque sabbat, le peuple de Dieu se met à l’écoute de cette même Parole créatrice et efficace.   
           
Ce matin-là, l’enseignement de Jésus va se manifester dans toute son autorité et sa nouveauté. Jésus apporte un enseignement nouveau où l’acte est joint à la parole : Tais-toi! Et l’esprit impur sort aussitôt. La scène se répétera un peu plus loin dans l’évangile quand il dira au vent et à la mer démontée : Tais-toi! Il s’ensuivra un grand calme. Jésus est la Parole qui fait ce qu’elle dit. C’est pourquoi ses auditeurs disent qu’il parle avec autorité. Jésus a une parole libre et libérante. C’est ça surtout qui frappe ses auditeurs.   
           
Pourquoi disaient-ils que Jésus enseignait avec autorité? Parce qu’il n’enseignait pas comme les scribes et les pharisiens. Ceux-ci se contentaient de répéter ce que les Anciens avaient dit et de les commenter. L’Évangile en donne beaucoup d’exemples sur des points d’observance rituelle. Or Jésus, lui, agit et enseigne. Chez lui, enseignement et attitude sont liés. Sa parole commente son comportement. Face à un malade, il réagit instinctivement. Il le guérit avant de penser aux observances du sabbat.   
           
Quand les pharisiens lui reprochent de ne pas respecter la tradition des Anciens, Jésus répond en contestant l’origine divine de ces observances. Elles sont humaines et ont une utilité humaine en vertu de leurs bienfaits ou de leur dommages individuels et sociaux. L’autorité de Dieu n’est pas engagée dans leur contenu. Or les pharisiens leur attribuent une valeur démesurée au point de faire oublier le commandement d’aimer son prochain. Ou encore, au reproche des pharisiens, Jésus répond en faisant appel à la liberté de David lui-même, cette grande figure de la religion juive. Il rappelle à ceux qui ne sont pas fanatiques que Le sabbat est fait pour l’homme. Ce que, d’ailleurs, les juifs ordinaires admettaient : Qui d’entre vous, s’il n’a qu’une seule brebis et qu’elle tombe dans un trou le jour du sabbat, n’ira la prendre et l’en retirer?     
           
Pour Jésus, la Loi est à juger à la double exigence de l’amour de Dieu et de l’amour du prochain. S’il ne craint pas de transgresser la Loi au point de scandaliser son entourage, c’est que sa liberté est une forme de son amour du prochain. Jésus ne s’appuie sur aucune tradition. Il est libre. Sa conduite s’appuie sur sa proximité filiale à l’égard de Dieu et son amour effectif du prochain. Ce sont les deux principes qui guident son agir.         
           
Est-ce que nous faisons ce que nous disons? Dans la perspective chrétienne, ce que nous faisons fait partie de notre parole. Ce que tu fais parle plus fort que ce que tu dis. N’y a-t-il pas un dicton qui ressemble à cela? Nous rejoignons ainsi la force dynamique de la Parole de Dieu à l’œuvre depuis la création et toujours à l’œuvre dans les signes de nouveauté qui se présentent à nous encore aujourd’hui. Des agirs qui font grandir la vie et des paroles qui sont libérantes. Que Dieu nous en inspire!