CCSA






Communauté chrétienne St-Albert le Grand





4e Dimanche du Carême

«  Vous êtes lumière !  »

19 Mars

Jean 9, 1.6-9.13-17.34-38

1 Samuel 16, 1b.6-7.10-13a

Ephésiens 5, 8-14

Hubert Doucet


L’histoire de l’aveugle-né que nous raconte l’évangéliste saint Jean ne se retrouve nulle part ailleurs dans les autres évangiles. De plus, elle est vraiment originale.
Jésus a redonné la vue à bien des aveugles, mais jamais, sauf ici, à un aveugle-né. De plus, personne ne demande à Jésus de guérir cet homme, pas même le futur miraculé. Le guérisseur agit de sa propre initiative, appliquant de la boue sur les yeux de l’aveugle et invitant tout simplement ce dernier à aller se laver à la piscine. L’homme y va et se trouve guéri. Rien d’autre ne se passe et le thaumaturge se perd dans la foule.    
Et voilà que cet homme qui n’a jamais vu personne se retrouve au cœur d’un débat public, mais plus isolé que jamais. Comme dans les situations qui sortent de l’ordinaire, les voisins en arrivent rapidement à la seule conclusion qui s’impose : « quelqu’un peut peut-être retrouver la vue qu’il avait perdue, mais en aucun cas la vue peut revenir si elle n’a jamais existé ». Les chefs de la cité, pour leur part, sont en colère parce que quelqu’un a trouvé la lumière en dehors de leur contrôle. Cet homme qui enfin voit, n’est accueilli par personne, il se retrouve seul.   
Dans son isolement, le nouveau voyant est cependant impressionnant. Tout au début de l’histoire, il sait qui il est et que sa condition ne peut être que permanente. Il ne court donc pas après le premier thaumaturge venu.       
Parce qu’il connaît bien sa condition, il est capable d’entrer en discussion avec les pharisiens et de les confronter à leur contradiction. Cette personne handicapée me paraît avoir une grande confiance en soi; elle est résiliente. Il a grandi dans la souffrance et sa souffrance ne l'a pas fait mourir. Il me fait penser à bien des malades chroniques d’aujourd’hui dont la condition n’a pas annihilé leur force de vivre.    
Cet homme est un être de lumière; son histoire l’a ainsi fait. Son argument contre les pharisiens est simple et plein de bon sens dans le contexte de son temps : si Jésus ouvre les yeux d’aveugles de naissance, il ne peut venir que de Dieu. Son argument vient de son expérience vécue. L’argument des pharisiens ne vient pas de l’expérience, mais de la loi écrite : ne rien faire le jour du sabbat. L’ancien aveugle sait d’expérience ce que Jésus a fait pour lui. « J’étais aveugle, à présent je vois. » 
L’histoire de sa vie, nourrie de tant d’expériences heureuses et malheureuses, va le conduire encore plus loin. Elle le prépare à accueillir Jésus.    
Dans le récit qui nous est raconté aujourd’hui, Jésus ne parle à l’homme guéri qu’à la toute fin du récit : « Crois-tu au Fils de l’homme? » Sa réponse est d’une grande simplicité, comme si toute sa vie l’avait préparé à entendre cette parole et à y répondre : « Et qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui? »
L’histoire qui vient de nous être racontée décrit un cheminement de vie qui conduit à Jésus. Les événements que cet homme a vécus l’ont fait cheminer, lui ont ouvert les yeux sur la vie et il les a intégrés. Lorsqu’à la fin du récit, Jésus se présente à lui, l’homme est prêt à l’accueillir. Les événements qu’ils a vécus et la manière de les recevoir et de les intégrer à sa vie ont permis à cet homme de rencontrer Jésus et, illuminé par lui, de répondre à son invitation. En ce temps de carême, comment accueillons-nous les événements de la vie pour devenir lumière à la manière de l’aveugle-né?