CCSA






Communauté chrétienne St-Albert le Grand





Premier Dimanche du Carême

Un temps de recul

26 février

Mt 4,1-11.         

Ge 2, 7-9; 3, 1-7a

Rm 5, 12-19.

Hubert Doucet

Où serions-nous aujourd’hui si Adam et Ève avaient résisté à la proposition du serpent? Le monde serait-il parfait, sans aucun défi à relever? Le ciel étant déjà sur terre, vivrions-nous tous et toutes dans une infinie beauté et une parfaite bonté? Pour dire vrai, ces questions sont purement chimériques, car elles ne sont pas celles de notre histoire.    
Notre histoire, c’est que nous devons ouvrir les yeux. Et quand nous les ouvrons, nous nous rendons compte que nous sommes nus : « Alors leurs yeux à tous deux s’ouvrirent et ils se rendirent compte qu’ils étaient nus ». Dans le texte de la Genèse qui vient de nous être lu, la nudité exprime la fragilité et la crainte d’être vu comme on est. Cette prise de conscience de qui nous sommes, des êtres à découvert, sans protection, Dieu s’en soucie (Ge., 3, 21) puisque Yahvé fabrique à Adam et Ève des tuniques de peau. C’est le passage de l’enfance à la prise de conscience de soi, avec les implications qui s’ensuivent.    
Cette conscience de soi, Jésus l’avait lorsqu’il est entré au désert. Il avait été baptisé par Jean-Baptiste, son Père lui avait révélé qui il était et l’Esprit lui avait confirmé sa mission. Il connaissait donc l’engagement qui devait être le sien. Pourquoi alors retarder le début de sa mission et s’en aller au désert pour 40 jours? Simplement pour se faire tenter par le diable? C‘est bien ce que pense l’évangéliste Matthieu : « Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le diable. »         
En agissant comme il le fait, Jésus témoigne de sa spiritualité. Il sait qui il est, il connait sa mission messianique, mais il sent le besoin de vérifier, d’examiner ce que son engagement va exiger de lui. Quel type de Messie sera-t-il?  Est-il aussi possible qu’il refuse l’engagement que les événements de la vie lui demanderont? Le récit de Matthieu montre que ces 40 jours ont permis à Jésus de se situer clairement par rapport à l’engagement qui sera le sien      
Le diable fait revivre à Jésus des défis semblables à ceux auxquels Israël a eu à faire face au désert ou à d’autres moments de son histoire et qu’il a été incapable de relever. Premier défi : au désert, le peuple s’était révolté contre Yahvé car il n’y avait plus de nourriture. Après 40 jours de désert, Jésus aussi a faim. Se laissera-t-il prendre par la solution miraculeuse du tentateur? Deuxième défi : au cours de l’histoire, les chefs d’Israël se sont souvent servis de la parole de Dieu pour contrôler le peuple et asservir les petits. Dans la deuxième tentation, c’est ce même procédé qu’utilise le diable : que Jésus se serve de la parole de Dieu dont il est le porteur pour accroître son pouvoir. Le troisième défi concerne l’idolâtrie, une tentation constante pour Israël et à laquelle le tentateur confronte maintenant Jésus.  Jésus est invité à rendre un culte au diable qui, en contrepartie lui offre non seulement du pain, mais le pouvoir sur la terre entière.  
Les propositions du tentateur reprennent des défis qui avaient confrontés Israël et que ce dernier avait été incapable de surmonter. Et comment Jésus s’en sort-il? En relisant l’Écriture qui le conduit à s’en remettre totalement à son Père. Notons que les trois paroles de l’Écriture que Jésus cite nous recentrent totalement sur Dieu : « vivre de toute parole qui sort de la bouche de Dieu »; « ne pas mettre à l’épreuve le Seigneur ton Dieu; « adorer le Seigneur ton Dieu et lui seul ». 
Voilà ce que Jésus a vécu en ces 40 jours. À nous maintenant qui entrons dans le carême de trouver la manière d’être qui nous fera rejoindre Jésus dans son désert. Puisse l’Esprit nous soutenir.