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Communauté chrétienne St-Albert le Grand




 

 


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32e Dimanche du Temps Ordinaire

6 novembre 2022

Croire à la vie

2e livre des Martyrs d’Israël (7,  1-2.9-14) 

Luc, 20, 27-38

Hubert Doucet

Les communautés chrétiennes des années 80-90 s’interrogeaient beaucoup sur la pertinence de leur foi. Elles avaient cru fermement que Jésus était ressuscité. Les femmes et les apôtres avaient attesté l’événement. Et liée à cette foi, se trouvait la conviction que Jésus allait bientôt revenir pour les introduire, avec lui, auprès du Père. Mais peu à peu, il était devenu évident que les choses se passaient autrement : Jésus le ressuscité ne venait pas les chercher. Comment réagir devant ce non-retour?   
L’évangile de Luc que nous venons d’écouter me paraît comme un soutien à ces communautés chrétiennes déconcertées afin que leur foi en Jésus ressuscité continue d’animer leur vie malgré les défis du moment. Peut-être est-il intéressant de noter que la discussion avec les Sadducéens a lieu dans le Temple de Jérusalem, à peine deux ou trois jours avant la mort de Jésus. Au moment où cette discussion a cours, impossible d’imaginer ce que sera l’avenir ni d’en anticiper les contours, mais Jésus demeure convaincu : nous ne sommes pas faits pour mourir mais pour vivre. « Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. »   
 Cette parole prononcée au moment où Jésus se rapproche de sa mort fait bien ressortir à ses interlocuteurs que Dieu n’est pas tourné vers la mort, mais vers la vie. Toute la Bible, que ce soit le récit de la création ou l’histoire de l’engagement de Yahvé pour son peuple, ne nous conduit-elle pas à reconnaître que le dernier mot sera à la vie? Depuis le commencement du monde, le désir de Dieu est que toute l’humanité grandisse dans sa capacité de croire à la Vie, c’est-à-dire se reconnaisse « enfants de Dieu et enfants de la résurrection, » comme le précise Jésus à ses interlocuteurs.   
Lorsque les Sadducéens imaginent la vie dans un état de résurrection, ils l’imaginent comme une amélioration, une optimisation de la vie actuelle. En ce sens, ils ont bien raison de conclure que cela n’a pas de sens, on se retrouverait dans un immense embourbement sur les routes du ciel. Jésus a une tout autre perspective, une perspective étonnante : nous sommes, dit-il, des « enfants de la résurrection ».      
Une telle formule ne signifie-t-elle pas que, sous le regard de Dieu, avant même ma naissance, i.e. au temps de ma conception, la résurrection de Jésus était déjà en train d’éclore en moi. Cette résurrection de Jésus « féconde ce qui s’efforce de naître et de vivre ». (Miguel Roland-Gosselin, SJ.)    
Dans ce contexte, je me suis demandé en quoi l’histoire des sept frères arrêtés par le roi Antiocos pour les forcer à manger du porc, viande interdite, pouvait bien enrichir notre réflexion. Ces jeunes, comme bien des jeunes de leur âge, étaient animés de résurrection et soucieux de vie. Si manger du porc est en soi sans importance, pour eux la règle d’interdiction s’inscrivait dans une longue histoire qui les avait nourris et remplis de vie. C’est pourquoi, même à leur âge, ils avaient la force de résister à la volonté de puissance du roi qui voulait les réduire à son image. Son objectif était de détruire leur altérité, leur différence, leur vie quoi!     
Dans l’histoire humaine, combien d’hommes et de femmes, nourris d’un idéal, qu’il soit religieux, national, humanitaire ou autre, ont été capables de vivre les souffrances les plus atroces parce qu’ils ou elles croyaient à la Vie qui les animait. Dans la mort qu’ils vivaient, ils étaient déjà ressuscités.    
Croire à la Vie, c’est nous engager à faire advenir la vie dans ce monde qui est le nôtre. N’est-ce pas l’idéal qui habite la communauté Saint-Albert depuis plus de 50 ans maintenant !