La parabole aurait pu s'appeler : "la parabole des fils perdus", non seulement le fils cadet, perdu dans la débauche, mais aussi le fils aîné, le fils obéissant, devenu un homme perdu dans sa colère, sa rancune et son amertume.
Et puis, il y a le père, un père qui semble comprendre, au-delà des normes sociales de son temps, le besoin de ses fils d'être eux-mêmes, un père qui sait qu'ils ont besoin aussi de son amour, un père qui connaît leurs dons uniques et leurs faiblesses et qui les aime d'un amour inconditionnel.
C'est une vieille histoire que nous entendons, année après année, mais est-ce qu'elle ne touche pas encore notre cœur? Est-ce qu'elle ne trouve pas un écho dans notre vie de tous les jours?
En effet, comme père, comme mère (biologique ou de cœur), n'avons-nous pas un jour fait l'expérience d'un(e) enfant qui s'est éloigné(e) et que nous sommes impuissants à rejoindre?
Peut-être avons-nous été nous-mêmes ce jeune rebelle et révolté?
Ou sommes-nous, en ce moment même dévoré d'inquiétude au sujet d'un enfant qui ne donne plus de nouvelles et que nous savons mal pris(e)?
Comment alors ne pas être bouleversé(e)s par l'attitude de ce père au retour de son fils cadet?
Écoutons encore :
"Tandis qu'il était encore loin, son père l'aperçut et fut saisi de compassion. Il courut se jeter à son cou et l'embrassa tendrement."
Est-ce que derrière cette phrase, on n'entend pas les nuits sans sommeil, l'angoisse, le chagrin, le deuil, le cœur brisé de ce père à l'idée que peut-être il ne reverrait jamais son fils?
Et pourtant (face à son fils), pas d'explication, pas de reproche, que de l'accueil, que de l'amour, que de la joie!
Et plus tard, alors que le fils aîné en colère ne veut pas participer à la fête (donnée en l'honneur de son frère), le père sort et le supplie d'entrer. Face aux récriminations de son fils, le père ne se défend même pas, pas de jugement, pas d'accusation, seulement ces mots :
"Toi, mon enfant, tu es toujours avec moi."
Combien Jésus, à travers ces mots, nous fait sentir de quel amour lui se sait aimé du Père. Il veut nous faire comprendre que c'est ainsi que chacun(e) est aimé(e).
Et nous, pouvons-nous croire que nous sommes vraiment aimés ainsi? Pouvons-nous nous laisser trouver par le Père qui nous attend? Pouvons-nous nous laisser réconcilier avec nous-mêmes et avec Lui? Nous aussi nous sommes à nos heures les enfants perdus du Père?
Mais pas de retour sans faim et sans soif. Faim du cœur ou faim physique, comme dans le cas du fils cadet.
Comme parents, face à nos enfants perdus, c'est bien souvent la souffrance, l'impuissance et les larmes qui ont dépouillé notre cœur, ouvrant la porte à ce Dieu qui nous cherche, qui veut être avec nous et nous guider. Peut-être avons-nous fait un pas nous aussi vers la vraie maternité, la vraie paternité, celle qui consiste à partager la pauvreté de l'amour sans exigence.
Mais que je sois le parent, le fils cadet ou le fils aîné, je ne peux pas me laisser trouver si je suis dans la peur, si je n'ai pas confiance. Alors demandons à Dieu de nous conforter dans la certitude que rien, absolument rien, ni la haine, ni le doute, ni la mort de notre désir, ni la nuit de la foi, rien, absolument rien ne peut nous séparer de l'amour de Dieu qui est en Jésus-Christ.