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Communauté chrétienne St-Albert le Grand





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20e Dimanche du Temps Ordinaire

16 août 2020

« Femme, ta foi est grande… »

Guy Lapointe

Isaïe 56, 1. 6-7

Matthieu 15, 21-28


Avons-nous bien entendu ? Voici un passage évangélique qui montre Jésus en train d’échanger avec une Cananéenne. Dimanche dernier, l’évangéliste Matthieu nous présentait Jésus, lors de la multiplication des pains, pris de compassion, au point qu’il renonce à s’isoler comme il avait prévu de le faire. La Cananéenne est l’une des Guyfigures de Matthieu dans l’Évangile que nous venons d’entendre. En relisant ce passage d’Évangile, j’ai lu une remarque de la théologienne protestante, France Quéré, qui écrivait : Jésus s'est fait homme jusqu’aux préjugés. Dans son pays, on n’aime pas les Cananéens.       
Aujourd’hui, nous avons bien entendu un passage d'Évangile qui peut nous paraître provocateur. Et je crois qu’il l’est. Un passage qui montre d’abord un Jésus qui semble indifférent à la situation de la femme cananéenne et qui a l’air de refuser de l’aider, parce qu’elle n’est pas d’Israël. Les disciples s’approchent de Jésus pour lui demander : Renvoie cette femme, car elle nous poursuit de ses cris ! Jésus répondit : Je n’ai pas été envoyé que pour les brebis perdues de la maison d’Israël. Mais en réalité, cette rencontre est la plus sympathique de la Bible. La Cananéenne est la seule personne, dans les quatre évangiles, à gagner un argument avec Jésus. Ce sont justement sa détermination, son humilité, sa grande foi qui provoquent l’admiration de Jésus et le convainc d’exaucer sa demande. Quelles attitudes successives cette femme vit-elle ?
D’abord, la femme crie à Jésus : Aie pitié de moi ! Jésus ne bronche pas. Elle est une païenne et reconnait Jésus comme Seigneur et Fils de David. Elle dit toute la gravité de la situation, que sa fille est cruellement tourmentée par un démon.           
À leur tour, les disciples exaspérés demandent eux-mêmes à Jésus : Renvoie-la, car elle nous poursuit de ses cris. Rien n’y fait. Jésus répondit : Je n’ai pas été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël. La femme vient se prosterner. Toujours aucune réaction de Jésus.        
Matthieu nous présente une mère qui ferait n’importe quoi pour obtenir la guérison de sa fille et qui intercédera avec insistance auprès de Jésus pour son enfant. Elle savait ce qu’elle voulait.
Cette femme montre une grande obstination. Elle n’a pas renoncé devant l’irritation des disciples, ni devant la remarque inadaptée de Jésus pour l’écarter. Elle avait confiance que Jésus puisse l’aider à guérir sa fille. La Cananéenne est l’une des figures les plus ouvertes de la tradition biblique.                
Cet évangile nous montre trois vertus spéciales de cette femme, à savoir sa forte foi en la vie, sa profonde modestie et sa prière persévérante, toutes les trois ancrées dans son amour de mère qui s’identifie complètement avec la souffrance de sa fille tourmentée par un démon.    
Toute cette attitude de la Cananéenne laisse Jésus assez froid. Ce n’est rien de tout cela qui fait intervenir Jésus en faveur de cette femme et ce qui lui fait dire que la foi de cette femme est grande. C’est quand elle rebondit sur sa remarque cinglante, quand Jésus lui dit : Il n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le jeter aux petits chiens. Elle lui répond, avec une certaine vivacité : C’est vrai, Seigneur. Et justement les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres.        
Peut-être qu’un autre aurait été offensé en entendant les mots de Jésus : Ce n’est pas bien de prendre le pain des enfants pour le jeter aux chiens. Mais elle avait un unique but, peu importe comment on la considérait. Ce qu’elle voulait, c’est que sa fille tourmentée par un démon, guérisse. Jésus s’incline devant cette volonté féminine. Alors qu’il y a d’extraordinaire dans cette déclaration ?  
Dans la phrase de cette femme, il y a deux choses, deux choses en opposition : d’un côté les petits chiens, de l’autre les maîtres. Le surplus de nourriture des maîtres permet aux petits chiens de se nourrir. Que représentent les maîtres, que représentent les petits chiens ? Un peu avant, il y a eu la multiplication des pains. Tous ont mangé à leur faim, et il y a même eu des restes : douze corbeilles pleines. Les maîtres, ce sont les Juifs et les petits chiens se sont tous les autres.      
L’admiration de Jésus pour cette volonté féminine de la Cananéenne nous invite à réfléchir sur nos propres discriminations et nous indique l’attitude à adopter envers ceux et celles qui sont dans le besoin.       
Femme, ta foi est grande ! Que tout s’accomplisse comme tu le veux.