En ces temps difficiles où nous sommes confinés dans nos habitations respectives, il est facile de nous reconnaître dans ces pèlerins d’Emmaüs. Ils viennent de perdre leur leader. Ils sont désespérés. Quelqu’un se joint à eux sur la route et une véritable rencontre se produit. Du désespoir ils passent à l’espérance parce qu’ils viennent de reconnaître dans ce voyageur, Jésus ressuscité. Alors que nous célébrons aujourd’hui la grande fête de Pâques, ce récit peut nous aider à percevoir des signes de l’énergie de la résurrection toujours à l’œuvre parmi nous.
Qu’est-ce qui se passe donc dans cette rencontre qui vient retourner complètement leur malheur? Rappelons-nous. Ces disciples ont vécu les événements difficiles du procès injuste et de la passion de Jésus. Ces disciples sont désemparés car ils avaient mis toutes leurs espérances en lui, ce prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple. Or ce prophète a été mis à mort, anéantissant toutes leurs attentes. Ces disciples sont cependant alertés par une nouvelle : des femmes qui se rendaient au tombeau n’ont pas trouvé son corps. Elles ont même eu une vision : des anges qui disaient qu’il est vivant.
Que fait Jésus? Il les interpelle vivement! Il leur reproche de n’avoir rien compris. Et il se mit à interpréter les Écritures, c’est-à-dire à dégager leur sens pour aujourd’hui. On devine qu’il leur rappelle ce passage déterminant où, devant l’oppression du peuple d’Israël en Égypte, Dieu a été remué dans ses entrailles et est descendu pour les délivrer. Ou encore, au terme de l’Exil à Babylone, quand Dieu prend en pitié son peuple affligé et leur annonce la joie du retour à Jérusalem. Ou encore, quand ce même Dieu de justice et de miséricorde soutient les justes persécutés et son serviteur souffrant.
Les disciples d’Emmaüs sont tellement réconfortés par ses paroles qu’ils insistent pour qu’il reste avec eux et l’invite à prendre le repas. C’est au moment de la fraction du pain qu’ils le reconnaissant enfin. Ce voyageur c’est Jésus revenu à la vie, à cette vie que Dieu n’avait cessé d’annoncer dans les Écritures. L’espérance que Jésus avait fait naître en eux au cours de tous ces mois de fréquentation s’actualisait dans leur aujourd’hui. Quand il fut à table avec eux, ayant pris le pain, il prononce la bénédiction et, l’ayant rompu, il le leur donna. Oui, quand vous vous réunissez autour de ma parole d’espérance et que vous partagez le pain et la coupe entre vous, je suis présent au milieu de vous.
Dans la situation actuelle que nous connaissons où beaucoup de gens perdent la vie à cause du virus qui nous afflige, plusieurs pourraient être découragés, désorientés, paniqués. Or nous constatons une grande mobilisation pour neutraliser cette nouvelle menace à la vie. Une lueur d’espérance commence à poindre depuis un certain temps.
Dans une infinité de gestes, nous voyons des actualisations de l’Évangile : J’ai eu faim et vous m’avez donné à manger. J’ai eu soif et vous m’avez donné à boire. J’étais très malade et vous m’avez visité. On se plaint parfois que nos concitoyens ne viennent plus à l’église. Mais il faut aussi reconnaître que, lorsque des catastrophes se produisent, un grand élan de solidarité se manifeste. Nous sommes toujours impressionnés par la capacité de nos gens à se mobiliser, à s’impliquer et à donner.
Et les gens le font, non pas simplement parce que c’est leur devoir, mais surtout parce qu’ils sont touchés par la souffrance de leurs concitoyens. — Survint, sur la route, un Samaritain qui, en voyant l’homme blessé sur le bord de la route, fut pris de pitié. Tout de suite il s’arrêta et lui porta secours. —- Comme le fils était encore loin, son père l’aperçut et fut remué dans ses entrailles. Il courut se jeter à son cou. — Dans le cortège, il y avait la mère, une veuve, qui venant de perdre son fils unique. En la voyant, le Seigneur fut pris de pitié.
Les gestes de secours et de solidarité de nos concitoyens pour aider les personnes malades, motivés par la compassion devant la souffrance et la misère, sont certainement des signes de l’énergie de la Résurrection. Par ces gestes nous devenons de meilleurs humains. Il y aura malheureusement encore de nombreux morts. Mais une lutte pour la vie est sérieusement engagée. Nous devenons de plus en plus soucieux du soin qu’il faut accorder à la vie. La Bonne Nouvelle de la Résurrection continue de travailler le monde en vue de la réalisation du Royaume. Rendons grâce à celui qui nous inspire et nous entraîne : le Ressuscité présent dans le pain et le vin de notre eucharistie.