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Communauté chrétienne St-Albert le Grand





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3e Dimanche du Carême (A)

15 mars 2020

Une rencontre révélatrice

Exode 17, 3-7                      Jean 4, 5-15. 19-26a. 40-41    Romains 5, 1-2.5  

 

Hubert Doucet

 

Hubert Doucet      

La question qui donne naissance à l’exceptionnel dialogue auquel nous venons d’assister est toute simple : « J’ai soif. Pourrais-tu me donner à boire? » Si la question est simple, le contexte, lui, est plus compliqué. L’homme qui a fait cette demande se trouve seul et en territoire hostile. En effet, il est Juif. De ce fait, il se voit comme supérieur, il serait donc Hubert Doucetdéplacé qu’il dépende de gens inférieurs, ce serait profondément humiliant. Comble de l’humiliation, c’est à une femme qu’il doit demander de l’aide, une femme un peu hors normes, puisqu’elle n’est pas venue avec les autres femmes de la communauté. L’homme doit avoir bien soif pour s’abaisser à lui demander de le dépanner. Peut-être cette demande annonce-t-elle le cri de Jésus sur la croix « J’ai soif ».

La femme sent bien l’incongruité de la situation. Elle ne peut perdre sa chance de lui faire savoir qu’elle n’est pas femme à s’en laisser imposer par les autres, fussent-ils des hommes. Elle se fait ironique : « Toi un Juif, demander de l’aide à une Samaritaine? Qu’est-ce qui se passe? » À partir de la repartie de cette femme, commence la plus inattendue des rencontres. Lui qui, quelques instants plus tôt, se faisait railler par cette femme à qui il demandait de l’aide, voilà que maintenant, il lui offre une eau d’une tout autre nature, une eau qui va combler sa soif la plus intense.      

Comment expliquer ce retournement de situation? Jésus voit-il en elle une femme dont la façon d’être et de parler témoignerait d’un puissant désir de vivre? Elle saisit de façon remarquable que l’eau vive dont parle cet homme n’est pas tant une eau fantastique et disponible à perpétuité, mais qu’elle est autre, comblant les plus hautes attentes humaines.

Le courant passe avec cet étranger qui dialogue avec elle. C’est pourquoi elle ose lui poser toutes sortes de questions sur l’essentiel. Qu’en est-il des temples, des bâtiments de prière que chacun réclame pour soi? Y en a-t-il un de supérieur qui pourrait être le lieu de la vraie maison de Dieu ? La réponse est franche : « l’heure vient où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et vérité. »

À mesure que le dialogue se poursuit, son regard sur cet homme s’éclaircit : de Juif, il est devenu prophète, plus précisément un homme de Dieu inaugurant une nouvelle manière de rencontrer Dieu : en esprit et vérité. Ainsi tomberont les barrières qui empêchent de rencontrer partout le Père. Toutes ces réponses rendent la femme suffisamment à l’aise pour lui demander quand viendra « celui qui fera connaître toutes choses », i.e. le Messie.       

Alors, il lui confie ouvertement qui il est : « Je le suis, moi qui te parle. » C’est là, me semble-t-il, le sommet du dialogue. En effet, cette réponse « Le Messie, je le suis moi qui te parle », c’est la seule fois qu’il la prononcera avant sa mort. D’autres avaient voulu savoir s’il n’était pas le messie. Ils n’avaient pas eu de réponse. Seule une femme non juive entendra cette révélation de la bouche même de Jésus.      

Cependant, une autre fois dans sa vie, Jésus reprit la parole «J’ai soif ». C’est du haut de la croix quand il dit à toute l’humanité « J’ai soif ». Et du même souffle épuisé, il ajouta : « Tout est accompli.» Dans le don qu’il fit de sa vie, Jésus accomplit jusqu’au bout l’Écriture, venant rencontrer l’humanité pour que cette dernière réponde à son invitation de vivre en esprit et vérité. Ainsi, avec Jésus ressuscité, cette humanité pourra-t-elle se mettre en chemin pour accomplir la résurrection.