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34e Dimanche du Temps Ordinaire (C)
20 novembre 2016
Luc Chartrand
Des étiquettes extérieures à une inscription intérieure…
Des étiquettes plein la vue! Trois affirmations et une inscription vont dans le même sens. Les chefs, tournant en dérision l’un de ceux qui s’approchent de la mort, semblent concéder à Jésus une attitude salvatrice envers les autres : « il en a sauvé d’autres ». S’appuyant sur ce constat, ils le somment de se sauver lui-même, « s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ». L’étiquette « Messie de Dieu » doit être accompagnée d’une preuve tangible. De leur côté, les soldats optent pour une étiquette différente, celle de la catégorie politique, « roi des Juifs ». Échapper à une mort certaine, au nom d’un pouvoir politique, viendrait instaurer un royaume sans précédent. Le religieux et le politique s’unissent en un amalgame difficilement séparable pour ceux qui se trouvent concernés par ces trois crucifiés; bien que l’écriteau pourrait faire pencher la balance du côté de l’enjeu politique, puisqu’il y figure cette inscription : « Celui-ci est le roi des Juifs ».
Notre année liturgique se termine sur une scène dramatique. Trois personnes au seuil de la mort. L’un des crucifiés, qualifié de malfaiteur, emboite le pas après les remarques des chefs et des soldats. Il introduit une différence. Pour lui, les étiquettes Messie et Roi ne conviennent pas tout à fait. Il préfère mettre en évidence une autre dimension, « N’es-tu pas le Christ? » L’affirmation reprend celle des soldats : « Sauve-toi toi-même », mais associe une conséquence heureuse, pour celui qui prend la parole et son compère : « et nous aussi! ». Ici, l'« oint de Dieu » en se sauvant, aurait la possibilité d'entraîner les autres, du moins, les deux malfaiteurs avec lui. Alors qu’il était question du sort de Jésus, voilà que l’un des malfaiteurs élargit l’horizon.
Ce changement de perspective n’est pas satisfaisant pour l’autre crucifié. Il s’adresse à son compère d’infortune en faisant appel à leurs situations personnelles. « Tu es un condamné, toi aussi! Et puis, pour nous c’est juste : après ce que nous avons fait ». Nous venons de nous éloigner du monde des étiquettes. Il n’est plus question de Messie, de roi des Juifs, même de Christ. Il y a simplement la reconnaissance de deux situations personnelles.
Cette nouvelle approche du drame qui se joue conduit ce dernier à une demande : « Souviens-toi de moi quand tu seras dans ton Royaume ». La royauté, avec sa figure évidente de roi, laisse la place à celle d’un royaume. Celui-ci semble sans équivalent terrestre, en raison de la réponse de Jésus : « Aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis ». De constats tout extérieurs accolés à la personne de Jésus, nous passons à l’univers tout intérieur d’un malfaiteur. Son regard lucide sur sa situation lui permet de formuler une demande. Le cheminement de foi, la confession de foi ne passeraient-ils pas par une quête de sens qui a son origine au plus profond de nous-mêmes? Si le premier chapitre du livre de la Genèse nous a introduits au paradis, les dernières paroles de notre année liturgique nous y ramènent. Aucune étiquette ne peut être accolée à ce lieu mythique. Il est en quelque sorte un vague souvenir enfoui dans nos mémoires. Il ressemble à cet hymne de la première lettre de saint Paul apôtre aux Colossiens. Terminons notre année liturgique par cette Parole de Dieu.