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11 Dimanche du Temps Ordinaire(B)

14 juin 2015

La croissance du Royaume

Ezechiel 17, 22-24

Marc 4, 26-34

 

Yvon D. Gélinas

Yvon D. Gélinas

Par la force de deux petites histoires, de brèves évocations d’observations familières, se déploie devant nos regards admiratifs, le visage de la vie. Tous les traits y sont : la semence, la croissance, la moisson. En cette saison, à la croisée entre l’éveil et l’éclatement du printemps et la plénitude et l’avancée de l’été, monte en nous un sentiment de gratitude comme une espérance qui serait en train de se réaliser, de prendre forme. Admiration et action de grâce s’emparent de nous. C’est la vie qui se déploie, et toute la vie, par ces paraboles qui disent en plus le souffle de la vie, son esprit, son sens et son avenir. Nous est révélée la trame qui permet et soutient le tissu de la vie. La semence, comme la croissance et la moisson ne sont pas qu’un phénomène naturel, matériel, elles sont réalité humaine.            

Le semeur sortit pour semer. C’est lui, Jésus, qui, avec le geste volontaire et espérant, et large du semeur, jette au sol et au vent la semence de la Parole. Elle semble bien humble et petite en ses débuts cette Parole. Mais elle est entendue malgré son apparente faiblesse, son apparent simple énoncé de la réalité. Elle trouve le chemin du cœur, elle rejoint les aspirations de ceux et celles qui savent entendre, qui sont aux aguets dans leurs attentes. Elle croît la Parole et démontre sa force d’attraits et d’appels. Elle tient tête à la mort. Quand tout semble s’arrêter, elle fait naître de petites communautés, puis des grandes. Des lieux humains de partage, d’accueil, de réconfort et de confiance. Des lieux où se brisent toutes les solitudes. Le semeur est sorti pour semer. Et ce qui semblait d’abord n’être qu’une toute petite graine, qu’un geste d’un moment, bien proche d’une action sans lendemain, est devenu la naissance et la croissance d’un Royaume où tous et toutes, de tous les horizons ont accueil et place er bonheur. 

Oui, notre admiration s’éveille en action de grâce à l’évocation de ce geste et de ce qui s’ensuit, comme devant toujours le spectacle de l’abondance et de la verdeur de la nature au sortir d’un rude hiver. Oui, ce que disent ces paraboles, ce qu’évoquent ces images nous concernent et nous ne sommes pas que de simples spectateurs d’un cycle et d’un dynamisme où nous n’aurions aucune part.                 

Elle nous est destinée cette semence ; elle est tombée en nous la Parole et là, elle a connu force et croissance. Elle est, par sa vertu propre et par notre accueil et consentement, devenue notre Parole. A notre tour, avec nos moyens et possibilités, nous sommes désormais nous aussi le semeur qui sort pour semer. Parfois en des gestes larges, étonnants, évidemment pleins d’avenir. Mais le plus régulièrement bien plus simplement et humblement. Comme ce grain de moutarde dont on n’attendait que peu de chose et qui devint un grand arbre. Un simple geste de bonté humaine, un regard de compassion et d’affection – d’amour idéalement – nous semons l’espoir en l’autre, nous offrons abri et réconfort. Comme la main qui ne peut que donner une humble obole à cette autre main tendue vers nous, mais cela réchauffe quand même le cœur. Il y a ces petits gestes qui sont si grands quand ils sont motivés par un peu d’amour, qui sont comme des réponses à ce que l’Évangile a semé en nous. Il y a ces gestes que l’on pose, et il y a ces petits gestes – parfois des grands – que nous recevons. Nous sommes les uns, les unes et les autres en dialogue, en communion, et se bâtit ainsi un monde humain qui réjouit le regard de notre créateur.  

D’elle-même la terre produit l’herbe, l’épi et le blé. D’elle-même, mais il a fallu quand même le geste du semeur. Celui du premier semeur et celui que nous reprenons à notre propre compte et en accord et coopération avec le sien. Cependant le rappel est d’importance. Tout ne dépend pas que de nous. Qu’il dorme ou qu’il se lève le semeur… rappel à l’humilité de nos gestes, peut-être. Avant tout, expression de la confiance, de l’espérance et même du désintérêt qui font la semence bonne et productive. Nous ne sommes pas seuls, et nous reprenons les gestes et paroles de Celui qui a marché avant nous un chemin semblable au nôtre. Et puis malgré cette évocation de la croissance du Royaume qu’il a annoncé, combien de fois nous avons plutôt l’impression d’un piétinement ou d’un recul. Épreuve pour notre foi et notre espérance. Qu’il dorme ou qu’il se lève, la semence germe et grandit. Et nous avançons, même si c’est parfois dans l’obscurité en gardant l’attente de la lumière qui ne vient pas uniquement de nos propres forces.                 

Il a semé en paraboles, surtout en vie et souffle de vie. Et voici que longtemps après son départ de notre terre, il reste présent par le travail de nos cœurs et de nos mains. Nous sommes là nous réjouissant de sa Parole, prenant vie et sens de sa Parole, faisant mémoire en esprit et en actes de son geste.              

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal