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5e Dimanche du Temps Ordinaire (B)

8 février 2015

De la souffrance à la confiance

Job 7, 1-7

Marc 1 ,29-39

Yvon D. Gélinas

Yvon D. Gélinas

Le cri de la douleur et de la lassitude de Job : « la vie de l’homme sur terre est une corvée! ». L’expression du dur métier de vivre. Job crie vers le Seigneur et, nous le ressentons bien, ce cri est souvent le nôtre à certains jours. Pour nous, c’est le regard fatigué ou peiné que nous posons sur nos jours ou sur ceux des autres, de nos proches comme de tout homme ou toute femme dont nous constatons justement ce dur métier de vivre. Mais le cri de Job est aussi l’expression d’un désir profond, celui d’une vie différente, plus protégée, plus assurée : « Mes jours sont plus rapides que la navette du tisserand ». Job crie ainsi parce qu’il sait que Dieu l’entend; il connait bien le verset du Psaume : « Un pauvre a crié, Dieu écoute ». Son cri est une prière, une forte expression de sa confiance en ce Dieu qu’il sait être un Dieu de vie. Une prière également qui attend la guérison de son mal de vivre.        

L’Évangile nous conduit plus loin que cette fatigue, que cette détresse. À cause de jésus, de sa parole et de ses gestes, un sens apparaît qui ne nie pas ce dur métier de vivre, mais l’éclaire mieux, lui donne un horizon nouveau, en fait un désir nouveau. Voyons Jésus agir en son ministère de prédication, d’annonce de la Parole, et de consolation et de guérison. Il vient à peine d’arriver chez Simon et André, mais sans attendre, il apporte la guérison à une malade, la belle-mère de Pierre atteinte d’une fièvre qui la condamne à être au lit. Jésus s’approche, la prend par la main et la fait se lever. Le sens profond de ce simple événement ne nous échappe pas. La fièvre mène comme à une mort apparente, et le geste de Jésus est celui d’un retour au plein de la vie, d’une vie renouvelée, comme déjà une résurrection. Et un peu plus loin, le texte de l’évangile de Marc nous dit : « Il guérit toutes sortes de malades ».        

Voilà l’approfondissement qu’apporte l’Évangile au cri de Job, au regard désabusé, à l’espoir limité qu’il porte sur la vie. En Jésus, en son approche des malades, en son action de guérisseur, quelque chose nous est aussi révélé de nous-mêmes. Au fond de nos détresses, en l’incomplétude ressentie même en nos joies et nos bonheurs, nous avons le désir de plus et de mieux. Nous sommes comme des malades en désir et espoirs de guérison. Nos besoins de guérison! Parfois bien nettement physiques, mais souvent et surtout, les besoins de guérison de nos esprits et de nos cœurs. Il y a bien sûr le dur métier de vivre que nous connaissons tout comme Job, et puis la peine et comme ce sentiment d’inutilité que nous expérimentons en présence des maux des autres, en présence, - et comment! – des maux, des dérapages, des malheurs de notre monde et de notre temps. Nous désirons être guéris de tout cela, nous aimerions pouvoir agir en cela. Nous aimerions, comme Jésus, être capables d’une véritable compassion, d’un partage de peine. Nous voulons surtout ne pas nous contenter de paroles creuses et vaines, mais, comme Jésus, nous approcher, prendre la main, faire se tenir debout. Et nous nous employons, oui vraiment, en de semblables gestes. Oui vraiment nous sommes capables d’une présence et d’une assistance fraternelle et souvent correctement silencieuse auprès de ceux et celles qui comme nous ont besoin de la guérison de toutes sortes de maladies. Nous nous inquiétons du mal de notre monde et de notre temps, et là quand c’est possible nous agissons aussi, par nos engagements, par nos soucis, par notre compassion. Et toujours et encore nous tentons de répondre à des besoins de guérisons.    

Ne négligeons pas nos propres besoins de guérison pour autant, la guérison de toutes nos meurtrissures. N’hésitons pas à crier, comme Job, en une prière qui dit notre attente d’une réponse, d’un regard posé sur nous, d’une main qui vient nous soutenir et nous donner le goût de tenir debout.         

L’évangile de ce dimanche nous rappelle encore une autre attitude de Jésus. Au terme d’une journée chargée de la préoccupation et du soin des autres, après un court repos : « avant l’aube il alla dans un endroit désert, et là il priait ». Il ne suffit pas de se tourner vers les besoins des autres, de s’agiter parfois comme si le sort du monde était remis en nos seules mains. Il faut encore refaire nos forces, donner vie à nos âmes, nos cœurs, nos esprits. Nous ne sommes pas seuls. Nous ne sommes pas par nous-mêmes seulement conscients des besoins de guérison et des remèdes à apporter. Il y a la nécessité d’une véritable et nourrissante intériorité. C’est dans le silence, l’éloignement du monde et de notre propre moi parfois trop envahissant, que nous la construisons cette intériorité. C’est dans la prière que nous la trouvons, c’est dans un contact silencieux avec le Seigneur que nous assurons la vérité et le vrai but de notre souci et de notre action.   

Et puis revenons ici un instant à l’évocation de Job, l’ami du Seigneur soumis à une rude épreuve : ce sentiment d’inutilité et d’abandon; il crie vers le Seigneur parce qu’il trouve en lui-même, au profond de sa misère, tout ce qui lui reste de confiance et d’espoir en ce Seigneur auquel il s’adresse. Retrouvons nous aussi confiance et espoir, même dans les jours intenables. Et puis, et puis encore ne perdons jamais la conviction de la joie de l’Évangile. C’est cette joie, cette vitalité qui nous fait nous lever et sortir de nos fièvres. C’est cette joie, cette clarté et lumière de l’Évangile, cette Bonne Nouvelle qu’Il nous a apportée et nous redit sans cesse qui nous font tenir debout.         

 

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal