Bandeau de la communauté

Imprimer

La Nuit de Noël (B)

24 décembre 2014

Parmi nous, avec nous, pour nous

Is. 9, 1-6

Luc, 2, 1-14

Yvon D. Gélinas

Yvon D. Gélinas

Une grande clarté dans la nuit. Des chants joyeux. Des bergers, alertés par des anges, qui accourent vers une étable : dans la mangeoire, un nouveau-né. Tout le merveilleux de Noël. Le merveilleux d’un récit souvent entendu, qui nous est familier, mais chaque fois qu’on l’entend en cette nuit différente de toutes les autres, nous sommes comme émus, réjouis certainement. Un récit pourtant d’un événement bien simple : une naissance. Un événement qui devait être bien différent du récit que nous connaissons lorsqu’il s’est déroulé dans la réalité. Reprenons-le cet événement, dépouillé de tant de réflexions, d’images, de folklore même qui s’y sont ajoutés au cours de bien des années.    
Un jeune couple obligé, par le caprice d’une lointaine autorité, de voyager, de quitter sa demeure habituelle. La jeune épouse est sur le point d’accoucher. Et plus de place, pas d’endroit un peu tranquille dans une auberge surpeuplée, pour vivre une naissance. Un jeune couple pauvre? Peut-être pas. Pas riche en tout cas, humble, anonyme. Et, tout simplement, la naissance d’un enfant qu’on lange, qu’on dépose dans une mangeoire, faute de quelque chose de plus convenable, de plus confortable. Une naissance bien humble, qui attire les humbles. Des bergers, des hommes rudes, habitués à un dur travail qui fait d’eux des hommes redoutés, un peu exclus. Des paysans des environs aussi peut-être, des habitants d’un petit coin isolé où tout est ordinairement si paisible. Ils viennent tous s’émerveiller devant le spectacle toujours prenant, toujours chargé de rappels, d’émotions : un enfant qui vient de naître. La naissance d’un petit bien humble, d’un petit de parents humbles, qui attire des humbles.           

C’est bien cela l’essentiel de ce que nous dit le récit de Luc, de ce nous fêtons en cette veillée. Un événement familier, courant, pas neuf. Mais comme toute naissance, c’est l’événement d’un commencement, d’une promesse ouverte en avenir. Une joie, oui, mais avec aussi quelques inquiétudes. Quelle vie attend cet enfant? Quel soutien pour son grandissement? Quelle place pour lui en ce monde, quel accueil connaîtra-t-il? Les questions que l’on pose à chaque naissance, au-delà de la joie de voir la vie se perpétuer.         

Nous, nous savons quelle vie vivra ce Jésus qui vient de naître : un destin complexe, une vie dure, difficile jusque dans sa mort, jusqu’à l’autre nuit merveilleuse, celle de Pâques. Une vie de lumière aussi, vie de paroles qui libèrent, de gestes de dons, d’amitiés et de partage.       

Ce récit de naissance n’est pas un conte : il est pour nous enseignement d’une joie profonde, d’un destin qui nous concerne tous. Noël n’est pas une illusion, le clinquant d’un instant.    

Ce qui nous est dit et rappelé en cette nuit, c’est que lorsque Dieu vient à nous, il vient humblement, sans fracas, sans bouleversement apparent de l’univers. Oui, tout est changé par cette nuit de Noël, mais il faut avoir un cœur ouvert, humble, reconnaissant et confiant pour l’apercevoir ce changement. Oui. Dieu vient à nous mais il veut venir parmi nous : au plus humain de nos vies, dans l’événement d’une naissance. Il vient avec nous : dans des situations qui, au fond sont celles de toute vie. Il vient habiter à nos côtés, au quotidien des jours. Et toute la vie de Jésus nous le dira : il vient vivre nos désirs, nos efforts, nos épreuves, nos bonheurs. Il vient pour nous, pour nous dire et apprendre ce qu’est la vie, pour nous soutenir et nous éclairer dans nos vies. S’il vient dans la réalité de l’enfant qui a besoin des autres pour sa survie et son accomplissement, c’est peut-être qu’il veut aussi nous dire qu’il veut avoir besoin de nous pour que la justice et la paix que les prophètes liaient à la naissance de son fils, pour que la clarté que ce fils venait répandre, travaillent au cœur de notre monde souvent fatigué, désabusé. Tout peut sans cesse naître, recommencer, s’ouvrir en avenir, un avenir qu’il dépose largement entre nos mains.       

Comment allons-nous l’accueillir l’enfant de Noel, ce Dieu proche de nous? Sans nul doute en prenant notre place dans la longue suite des témoins de sa naissance, depuis les bergers en passant par tous les pauvres, les humbles de cœur, les affamés de paix, les faiseurs de vie et de justice; avec tous ceux-là qui font que jamais il ne sera oublié, condamné à l’inefficacité.        

En cette nuit de Noël, le plus bel accueil, la plus belle manifestation de la réception, de la confiance et de l’espérance que sa naissance parmi nous et avec nous sont venus nous dire, c’est de partager les uns avec les autres et avec tous, au-delà de tout et malgré tout, la joie, le merveilleux, le bonheur de cette nuit parce qu’il nous est redit que sans cesse la vie est relancée.   

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal