La Sainte Famille (A)
29 décembre 2013
La joie d'une jeune famille
Hubert Doucet
Au jour de Noël, tout à la fête, nous célébrions la joie d’une jeune famille accueillant son fils premier-né. Cette joie était telle que toute la communauté des environs se trouvait engagée à son tour dans la fête. Et voilà que, quelques jours plus tard, cette famille est confrontée aux problèmes et aux défis qui frappent bien des familles. Elle ne fait pas exception : la réalité avec ses exigences, ses contraintes, ses coups du sort, la rattrape. Comme bien des familles du Moyen-Orient, elle doit migrer pour espérer avoir un avenir.
Nous présentant ce qu’il est convenu d’appeler la Sainte Famille, l’évangile de Matthieu nous montre des parents qui doivent prendre la route, se mettre en mouvement avec leur enfant. Les conditions ne leur permettent pas de faire du sur place, cela conduirait à la mort de l’enfant et à la fin de la famille. Je trouve très stimulante cette histoire que raconte Matthieu. Elle nous montre qu’en se mettant en mouvement, une famille survit et grandit.
Comment, à partir des textes de ce dimanche, nous, nous mettre en mouvement? La petite équipe qui a préparé la célébration d’aujourd’hui a longuement discuté sur la façon d’aborder la question. On s’est, entre autres, demandé si le texte de Ben Sirac le Sage pouvait encore servir de modèle. Il y a des éléments intéressants dans cette lecture, même si ce type de famille ne peut plus être présenté comme le seul modèle. Il y a aujourd’hui toutes sortes de familles : classiques, recomposées, monoparentales, homosexuelles et ainsi de suite, sans parler des personnes qui ne semblent pas avoir de famille. À cette liste, s’ajoutent ceux et celles qui refusent la famille, car elle ne serait que « foyer clos » et « porte refermée ».
Quel que soit le modèle que vit chacun, chacune, tant le texte de Ben Sirac que celui de Paul nous montrent que ce qui fait la qualité et la beauté de la vie que nous vivons dans une unité familiale, ce sont les sentiments que nous développons les uns à l’égard des autres. Le sage Ben Sirac met surtout l’accent sur l’idéal qui doit animer les enfants et les comportements qu’ils doivent adopter à l’égard des parents, en particulier envers le père. On peut trouver que c’est un peu limité. Quelques éléments sont cependant d’une grande actualité, témoignant ainsi de la permanence de certaines réalités familiales. Je pense à ce passage : « Mon fils, soutiens ton père dans sa vieillesse […]. Même si son esprit l’abandonne, sois indulgent, ne le méprise pas, toi qui es en pleine force. » Une des préoccupations centrales de notre époque, le vieillissement, posait déjà problème au moment où ce livre est composé, soit deux siècles avant notre ère.
Le texte de Paul, quant à lui, élargit la perspective. Ne pourrait-on pas dire, à partir de cette lecture, que la famille, c’est une manière d’être les uns avec les autres. À lire Paul, aujourd’hui, je me dis que ce qui est premier, ce n’est pas la structure, c’est la qualité des sentiments et des comportements que nous avons les uns à l’égard des autres qui crée la famille. Il ne s’agit pas de nier la structure puisqu’elle favorise la stabilité et la permanence. Il s’agit plutôt de reconnaître qu’une structure ne peut soutenir la vie, c’est-à-dire la dynamique personnelle de chacun, que si elle est nourrie d’éléments que sont la bonté, la tendresse, l’humilité, la douceur, la patience. Quand ces éléments sont là, nous sommes en capacité d’être sensibles à l’histoire de chaque personne et ainsi de nous mettre en mouvement pour créer un seul corps dans le Christ.
Ces textes nous invitent à réfléchir à notre propre engagement concernant notre manière de vivre l’expérience familiale. Ces engagements diffèrent d’une personne à l’autre et les manières de construire la famille varient selon les cultures et les milieux. Cette diversité peut devenir une richesse pour l’humanité lorsque nous nous efforçons de pratiquer les attitudes et les comportements auxquels Paul nous invite : bonté, tendresse, humilité, douceur, patience. Puisse notre rencontre d’aujourd’hui nous soutenir dans cette voie.