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27e Dimanche du Temps Ordinaire (C)

6 octobre 2013

 

« Serviteurs inutiles »
« Serviteurs quelconques »

Lc 17, 5-10

Tm 1, 6-8, 13-14

Jacques Sylvestre

Ce texte est dur à entendre! Après tout ce que nous avons fait ou tenté de faire! Dieu nous considèrerait vraiment comme des serviteurs inutiles, des bons à rien! Il est vrai que souvent nous sabotons Son travail : la création, les relations humaines, familiales, même notre propre vie…      

Mais alors, pourquoi s’est-il choisi 12 hommes, ses apôtres? « Viens, suis-moi » qu’il dit à l’un et à l’autre, pêcheurs de métier, publicains, collecteurs d’impôts.     

Aujourd’hui encore, Dieu peut-il avoir besoin de nous?              

Serviteurs inutiles! L’expression nous heurte.                 jacques Sylvestre

Sans doute, Dieu n’a pas besoin de nous; mais rien ne peut l’empêcher de nous prendre encore à son service, simplement parce qu’il est père et que nous sommes ses enfants. S’il nous choisit, c’est qu’il nous aime assez pour nous faire confiance et nous donner une raison de vivre : collaborer à son œuvre en tout domaine. Avec un maître comme cela, qui peut refuser du travail, une responsabilité? Impossible d’être en chômage.                  

Serviteurs inutiles, peut-être, mais serviteurs quand même.  

Il avait enseigné au préalable:  

Si vous aviez de la foi gros comme un grain de moutarde, vous direz à cette montagne : va te jeter dans la mer et elle irait… Pourquoi la mer? Pourquoi pas ici ou là, sur le sol, dans la plaine? Faut-il tant de foi pour rêver pareille utopie?              

Il serait incompétent de considérer la foi comme une faculté imaginative, seule capable de combler notre ignorance, de faire des miracles. Croire, ce n’est pas dire des paroles par habitude, un Credo par exemple.            

Le pape François dans sa 1ère lettre encyclique, « Lumen fidei », définit la foi comme l’intelligence du cœur. Troublante définition, mais combien vraie!     

S’inspirant des amoureux, croire, c’est faire confiance par amour, s’engager à la suite de quelqu’un parce qu’on lui fait confiance et qu’on l’aime. Deux amoureux se lient jusqu’à la mort, et ce non par évidence, attrait ou désir, mais par confiance, par amour.                  

La foi se situe avant tout au niveau du cœur, une question d’amour, si invraisemblable que cela puisse paraître.         

« Le cœur, écrit le pape, est le lieu où nous nous laissons toucher et transformer profondément par ce qui est, ce que l’on aime. La compréhension de la foi est celle qui naît lorsque nous sommes frappés par l’amour, surtout le grand amour de Dieu qui nous donne des yeux nouveaux pour voir la réalité ».            

Ludwig Wittgenstein enseignait : « Croire est semblable à l’expérience de tomber amoureux.  » Pour l’homme moderne, hélas, l’amour se comprend aujourd’hui comme une expérience liée au monde des sentiments inconstants. L’amour ne peut se réduire à un sentiment qui va et vient, ce que souvent nous vivons en ces jours.   

C’est dans la foi, i.e. la confiance que l’amour nous ouvre à quelqu’un, les enfants à leurs parents, le fiancé à la fiancée. Parce que nous aimons, nous ferons confiance. C’est alors que nous commencerons avec confiance une marche qui suscitera l’abandon de notre propre « moi » et tous nos égoïsmes, pour nous ouvrir à l’autre et construire avec lui un rapport durable. L’amour vise à l’union éternelle avec la personne aimée.         

Serviteur inutile, déclarait Jésus. Alors à quoi bon servir si on ne sert à rien?                 

C’est ici que le terme serviteur — tout inutile qu’il soit — doit prendre toute sa valeur. Oublions pour un moment le qualificatif « inutile, quelconque ».      

Le service quel qu’il soit tire sa valeur du fait d’être accompli avec amour : amour du service sans doute, mais plus encore amour de l’autre. La tâche première d’un serviteur est d’aimer. L’amour est son maître. Redisons-le : tout service rendu, que ce soit entre nous ou pour Dieu, n’a de valeur et d’efficacité que s’il est fait par amour et avec amour. Quiconque rend service par amour, même s’il ne croit pas en Dieu, aime Dieu sans le savoir. Il est juste sans le savoir.              

Saint-Exupéry dans son livre « Le petit prince » fait dire au renard : « C’est le temps passé pour ta rose qui fait de ta rose « l’important »  »,

Le Christ n’a-t-il pas dit un jour à ses serviteurs inutiles, ses apôtres : « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi; mais c’est moi qui vous ai choisis. Allez! Je vous envoie. Ce que je vous commande c’est de vous aimer les uns les autres ». Lui-même s’est fait serviteur et l’un des nôtres pour être au milieu de nous comme celui qui sert, celui qui aime. Un jour, s’adressant à ses disciples, il leur déclarait : « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ignore ce que fait son maître; mais je vous appelle amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître ».        

Et dans une Parabole que l’évangéliste place presque au terme de sa catéchèse, la parabole des talents, le maître déclare à celui qui avait fait fructifier ses talents : « Bon et fidèle serviteur, parce que tu as été fidèle en tout, viens, entre dans la joie de ton Maître ».    

Retenons ce mot de Jésus : « Bon et fidèle serviteur, quelque inutile que tu puisses être, parce que tu as servi avec amour et fidélité, entre dans la joie de ton maître.  »             

 

 

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal