18e Dimanche du Temps Ordinaire (C)
4 août 2013
Qu'est-ce que vivre?
Guy Lapointe
Qu’est-ce que vivre? Question immense qui doit nous poursuivre toute notre vie. Les passages entendus nous invitent à y réfléchir. « Vanité des vanités », disait l’Ecclésiaste, — et il en rajoute — « Vanité des vanités, tout est vanité et poursuite de vent! » Ce passage de Qohélet, si bien connu, est déconcertant au premier abord. Il ne laisse personne indifférent. Ce cher Qohélet nous apparaît pour le moins désabusé. Par ailleurs, par certains côtés, il nous apparaît plutôt moderne. À voir parfois et à entendre dans une certaine Commission, ce qui se passe dans nos milieux, comment les uns profitent des autres et de toutes les situations pour faire de l’argent, pour engranger, on a envie de se dire : tout cela ne mène à rien : vanités des vanités, tout est vanité! Non, la vie n’est certainement pas de ce côté.
Dans le passage d’évangile entendu, Jésus est en chemin. Il est non seulement celui qui écoute, mais celui qui entre en conversation avec les gens qu’il rencontre. — L’Évangile n’est-il pas d’abord une conversation? — Jésus reprend en quelque sorte l’exclamation de Qohélet. Ici, il profite de la question de quelqu’un : « Maître, dit à mon frère de partager avec moi notre héritage. » Situation que l’on connaît bien aussi. Pour dire le fond de sa pensée, Jésus répond en utilisant une parabole : « Regardez cet homme, dit-il : il a une bonne terre, de bonnes récoltes, Il vit bien, mais il veut toujours plus, plus de profits, plus de sécurité… ». On peut se demander : qu'y a-t-il de mal à cela?
Jésus ne vient pas condamner la possession de biens. Il ne veut pas nous dire qu’Il faut n’avoir rien, ne pas prévoir pour les lendemains. Alors qu’est qui ne va pas chez cet homme qui engrange? Où le bat blesse-t-il?
Écoutez : Dieu lui dit, et il ne ménage pas ses mots : « Tu es fou, cette nuit même on te redemandera ta vie. Et ce que tu auras mis de côté, qui l’aura? » Ce qui « cloche » pour cet homme riche, c’est qu’Il se laisse enfermer dans sa possession. Il ne regarde que cela, il ne vit que pour cela. « Vanité des vanités et poursuite de vent … »
Oui, ce n’est pas d’utiliser ces biens, mais de ne regarder que cela. Jésus nous dit, faites de la place à autre chose : le regard, d’un enfant, l’amour mutuel, la main qui aide le démuni, la paix à cultiver, une personne à consoler… Gestes et paroles de vie que l’on voit et entend heureusement depuis des semaines autour de ce drame de Lac- Mégantic.
Ce que le sage Qohélet, ce que Jésus veulent nous dire, c’est que pour vivre sagement, il faut scruter le sens profond des choses. Ces sages se posent en tout premier lieu la question du sens de la vie.
Pourtant, on le sait d’expérience, la vie humaine est faite d’un tas de choses : le travail, la richesse, le plaisir, la douleur, la pauvreté, les joies, des déceptions. Quel est le sens de toutes ces choses? En fin de compte, une seule chose est importante: c’est la VIE. Ce dont est remplie la vie a certes son importance; mais il serait idiot de rechercher toutes ces choses si l’on oublie la seule chose qui compte : la VIE.
Le riche agriculteur de cette parabole qui n’était préoccupé que de l’accroissement et de la garde de ses richesses, oubliait de vivre la seule chose qui continue d’exister: la Vie.
L’oublie de cette valeur suprême de notre propre vie conduit au non-respect de la vie de l’autre; elle conduit à l’oppression et à l’Injustice, comme nous en avons tant d’exemples dans notre société.
La sagesse toute terre à terre de Qohélet, reprise par Jésus, nous rappelle que c’est tout d’abord en vivant et en vivant pleinement sans encombrement, la vie humaine, telle qu’elle a été voulue par Dieu, que non seulement nous atteindrons notre propre bonheur ici et dans l’au-delà, mais que nous contribuerons à l’établissement du Royaume de Dieu.
Qu’est-ce que la vie? C’est la seule interrogation que nous devons porter.
Je laisse à la musique de continuer l’homélie et de nous aider à porter cette question : à quoi ressemble ma vie?