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33e Dimanche du Temps Ordinaire (B)

18 novembre 2012

La voie de l’espérance

Daniel, 12, 1-3

Marc, 13, 24-32

Hubert Doucet

Les deux textes qui viennent de nous être proclamés nous présentent des interprétations assez semblables des malheurs du temps : cataclysmes, détresse, fin des temps. Rien ne résiste. Pourtant, si deux siècles à peine séparent la rédaction du livre de Daniel de celle de l’Évangile de Marc, l’histoire de Daniel remonte encore plus avant, soit le 6e siècle avant notre ère. Hubert Doucet

Il est intéressant de noter que ces deux récits ne sont que quelques-unes des multiples annonces de fin du monde qui se sont succédé depuis le commencement des temps. Et ce ne sont sûrement pas les derniers. Parmi ces textes, il y a celui de Saint Augustin sur la chute de Rome à l’été de l’année 410. Augustin rend particulièrement bien le sens que prennent pour nous les fins du monde.      

En 410, Rome, la capitale de l’Empire, la ville que le poète Virgile croyait éternelle, tombe aux mains des Barbares. C’est un drame humain épouvantable, la cité est mise à sac et pillée de ses trésors, les riches se sauvent et les plus pauvres sont laissés à eux-mêmes. Quel choc culturel terrible que ces trésors de civilisation détruits à jamais! C’est la honte et la désillusion. Tous, chrétiens et païens, parlent des « malheurs du temps » et s’accusent mutuellement d’en être responsables. C’est un langage qui, ces années-ci, ne nous est pas complètement étranger.
   

Dans des périodes de l’histoire où l’espérance est épuisée, comment retrouver la confiance dans l’avenir? La réponse des deux textes bibliques est claire : Dieu vient avec force et puissance, retrouvons confiance car la vie va renaître.        

La réponse d’Augustin me paraît plus complexe. Il ne nie pas les souffrances du temps, mais affirme que la réponse, elle, ne sera pas de nature apocalyptique. Il ne s’appesantit pas sur l’image du « Fils de l’homme venant sur les nuées avec grande puissance et grande gloire. » À tous ceux qui disent « Les temps sont mauvais… », Augustin répond plutôt : « Vivons bien, et les temps seront bons. C’est nous qui sommes ces temps. Tels nous sommes, tels seront les temps. » 

La réponse paraît quelque peu brutale et univoque. Comme pour toute formule choc, il faut sans doute la nuancer. Elle me semble cependant en droite ligne avec la Bonne Nouvelle de Jésus qui, dans nombre de ses paroles, nous engage à humaniser ce monde qui est le nôtre pour faire advenir le Royaume. C’est à une mutation des rapports humains que ce Royaume nous convie. Pensons à ces déclarations sévères de Jésus à propos des rapports hiérarchiques où les autorités « négligent ce qu’il y a de plus grave dans la Loi » (Mt., 23, 23) pour profiter du bien public. Pensons aussi à la bonté humaine que représente la parabole du Bon Samaritain (Lc., 29-37) ou celle du Jugement dernier où Jésus affirme : « À chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt., 25, 31-40) « Tels nous sommes, tels seront les temps. » La parole d’Augustin nous renvoie à la dynamique de l’évangile qui en est une d’engagement et de responsabilité.   

Cet engagement et cette responsabilité, ils sont déjà là, à l’œuvre. À y regarder de plus près, au milieu des situations les plus désespérantes, que ce soit chez nous ou ailleurs dans le monde, on découvre une diversité de réseaux qui promeuvent des projets d’entraide et de renouvellement de la vie sociale. Leur vitalité est signe de courage et d’espérance.

Même si parfois ce peut être de manière ambiguë, nombre de ces initiatives alternatives fleurissent sans trop de bruit; elles ressemblent aux branches tendres du figuier sur lesquelles apparaissent les premières feuilles du printemps, pour reprendre l’image de l’évangile d’aujourd’hui. Cette comparaison paraît saugrenue dans un évangile à saveur apocalyptique. L’image est cependant précieuse; elle invite à reconnaître que le Seigneur est déjà là à travers les engagements d’une multitude de nos contemporains qui nous font signe qu’un autre monde est possible. Nous sommes ainsi invités à nous engager sur la voie de l’espérance.        

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal