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23e Dimanche du Temps Ordinaire (B)

9 septembre 2012 

 « Ouvre-toi »!

 Is.35, 4-7a

Mc 7, 31-37

Guy Lapointe

Guy Lapointe

 Hasard de la liturgie! Les passages d’Isaïe et de Marc que nous venons d’entendre m’ont paru bien pertinents pour nous aider à mieux saisir le sens à donner à ce dimanche de la rentrée de notre communauté: en fait relancer la réflexion sur notre accueil de l’Évangile. « Prenez courage, ne craignez pas… « Alors s’ouvriront les yeux des aveugles et les oreilles des sourds », avons-nous entendu. Isaïe parle au futur. Jésus, lui, en guérissant le sourd-muet parle au présent et ouvre un avenir.  Guy Lapointe      

Dans le passage d’Évangile, Jésus se retrouve en territoire étranger. Il entre en territoire païen… Il prend l’initiative. Il pose un geste significatif, un geste porteur de sens. Il guérit un sourd-muet. Il le guérit avec des gestes pleins d’humanité. Il met les doigts dans les oreilles, comme pour les ouvrir toutes grandes. « En prenant de la salive, Il lui toucha la langue ». La salive, ça guérit, parlez-en aux parents qui ont de jeunes enfants. Et l’homme, qui était à la merci des autres, peut maintenant leur parler d’égal à égal. Et voilà qu’en terre dite d’incroyance, des emmurés se mettent à parler « ouvertement ». N’est-ce pas une situation que nous connaissons bien maintenant chez-nous? C’est comme si Jésus voulait dire à tout ce coin de pays : l’Évangile est un appel lancé à tout être humain et pas seulement aux convertis, ouvrez les oreilles.                  

Jésus veut libérer la parole; sortez de vos enfermements, semble-t-il dire. Sortons de nos enfermements comme vient de nous le rappeler le défunt cardinal Carlo Maria Martini. L’Évangile est un espace de liberté et de libération; l’institution ne sera toujours qu’au service d’une foi vivante. Nous ouvrir les oreilles pour mieux écouter ce qui se passe en nous et autour de nous pour entamer une conversation significative, tel est le défi humain et le défi de foi que nous avons à vivre et à relever. Une assemblée chrétienne, n’est-ce pas un lieu et un moment pour vérifier si nous sommes un peu moins sourd-muet, comme individu et comme groupe croyant. Être capable de parler et d’écouter. Ne sommes-nous pas appelés à être des passeurs de vie?             

En fait, ce passage d’Évangile nous redit ceci : discerner ce qui est germe de paix. Croyez en la valeur de la liberté, laissez-vous travailler de l’intérieur. Entrez en dialogue avec ce monde. Inventez des chemins pour croire. Bâtissez un monde habitable. Croyez en la cherche de la vérité. Reprenez souffle et cœur. Vivez une foi intelligente.                

Nous reprenons nos travaux et nos jours. C’est la rentrée. C’est le temps de nous ouvrir grandes les oreilles pour mieux entendre ce qui se vit en nous et autour de nous. Bien voir à quoi ressemble notre milieu de vie, notre société, notre Église. Un moment important de notre vie personnelle et de la société. Une foi qui s’intéresse aux autres et au Christ. Une foi vivante qui a besoin des autres.                 

C’est un temps favorable pour vérifier ce qu’on a à vivre en commun, ce qu’une assemblée comme celle que nous vivons le dimanche peut nous apporter, nous faire se rencontrer avec toutes nos différences respectables et ce que nous vivons au quotidien. Nous sommes ici pour écouter la Parole ensemble, pour refaire le geste de partage du pain et de la coupe. Nous sommes ici pour nous souvenir. Nous avons des itinéraires humains et spirituels fort différents. Nous sommes moins portés par une institution forte qui nous donnait l’impression d’être tous semblables. Et c’est heureux. Nous sommes des croyantes et des croyants qui traçons notre itinéraire dans un monde fascinant, mais ô combien déroutant parfois. Quel sens prend notre expérience de foi? Sommes-nous capables de nous ouvrir les oreilles pour mieux écouter et avoir une parole pertinente? Sommes-nous capables de nous parler et de dialoguer à même nos différences?                 

Comme Jésus dans la Décapole, territoire païen, nous sommes peut-être encore en terre religieuse, mais comment se porte la foi chrétienne? Le Québec a pris une telle distance… Comme pour oublier, il s’est retiré de grands pans de son histoire religieuse. Il lui manque des lieux et des temps pour de nouveau se ressaisir et emprunter peut-être de nouvelles routes, de nouveaux chemins, parfois risqués. Comment se vit la foi à l’Évangile et en Jésus? Il y a des itinéraires de foi qui peuvent nous dérouter. Nous avons besoin ensemble d’ouvrir de nouvelles routes pour l‘Évangile; pour que son message nous rejoigne. Cette communauté me semble ouverte à cela. Je pense qu’il y a un réel désir de donner tout son sens à l’Évangile :         

Quand la parole des autres n’est ni ignorée, ni monopolisée. Quand sont déverrouillés les blocages personnels. 

Quand partout où des humains sont ensemble et établissent un juste équilibre entre la parole qui dit et le silence qui écoute.   

Quand passe, dans les familles et les groupes, le courant de communication qui devient communion, l’Évangile progresse.           

Quand, à l’ìntérieur même de ce que disent les humains, les croyants discernent la voix de Dieu, l’Évangile progresse dans le cœur de chacun. 

À travers nos itinéraires personnels et différents, les façons de rejoindre et d’être rejoints par l’Évangile sont de plus en plus multiples. Une communauté doit donc, pour accueillir ces parcours, respecter la différence des autres, ouvrir des espaces de liberté comme nous tentons de le faire ici. En partageant le pain et la coupe en mémoire de Lui et en mémoire de chacun et chacune de nous, en écoutant la Parole, chacune et chacun vit ce geste à sa façon. Espérons que nous pourrons nous rencontrer. Il y a un travail immense à accomplir. Je crois sincèrement que notre communauté tente de vivre l’Évangile à travers des attitudes et des gestes significatifs et libres. « Prenez courage, ne craignez pas… Jésus fait entendre les sourds et parler les muets ». C’est de Lui et de nous dont il parle… Oui, à la suite de Jésus, devenir, comme individus et, comme assemblée, des passeurs de vie… Et que le silence et la musique nous traversent le corps et l’esprit, et fassent entendre la voix de Dieu.

 

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal