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3e Dimanche du Carême (B)

11 mars 2012

La sainte colère! Enfin!

Bruno Demers

Ex 20 : Les dix commandements
1Co, 22-25 : Folie pour les hommes, sagesse de Dieu
Jn 2, 13-25 : Jésus chasse les vendeurs du Temple

Alors que beaucoup d’affiches nous présentent un Jésus «doucereux», se promenant sur les chemins avec une chemise fleurie en disant «Dieu est amour!», «Dieu est amour!» Alléluia… l’Évangile d’aujourd’hui nous donne le portrait d’un Jésus capable de se mettre en colère et plutôt vigoureux, pour le moins! Ça en rassurera plusieurs sans doute. Mais encore faut-il ne pas se tromper sur l’objet de sa colère. Et c’est justement ça qui est plus difficile à identifier.Bruno Demers

En effet, on est spontanément porté à croire que Jésus s’en prendrait aux méchants commerçants qui profitent de la moindre occasion pour faire de l’argent, a fortiori dans le Temple, lieu sacré par excellence pour les Juifs. Or ce n’est pas le cas! Les commerçants ne sont pas nécessairement du mauvais monde. Il y avait dans le Temple un espace prévu pour changer l’argent américain en deniers ou en sesterces et un espace alloué aux animaux servant aux sacrifices.C’était bien commode surtout pour les pèlerins venant de loin, comme de la Galilée par exemple. Ce n’était pas ça le problème!

Le vrai problème était beaucoup plus profond. C’était l’image de Dieu qu’il y avait derrière tout ça! On venait au Temple pour se mettre en règle avec Dieu : On avait manqué à des commandements? Eh bien, on venait offrir des sacrifices pour réparer nos fautes, pour se réconcilier avec Dieu. On cherchait un emploi, une maison, une blonde? Alors on offrait un sacrifice pour acheter les prévenances de Dieu. On marchandait avec Dieu! Dieu nous accordait ses faveurs en fonction de notre respect de la loi ou du prix qu’on avait payé pour un animal à sacrifier. C’est exactement cela que Jésus rejette depuis le début de son ministère. Les gens n’ont pas encore compris. Ils n’ont pas écouté. Il ne lui reste qu’une chose à faire : Tout virer à l’envers! Retourner les comptoirs des changeurs. Renverser, c’est-à-dire «convertir», car c’est le même mot pour les gens de l’époque. Dieu n’est pas quelqu’un avec qui on trafique, on marchande. Même les dix commandements de la première lecture ne visent pas ça. Car le don de la Loi survient après la sortie d’Égypte, où Dieu a libéré son peuple. Dieu commence par manifester sa bienveillance! Et à ceux et celles qui veulent le connaître davantage, il se révèle dans son alliance.

«Détruisez ce Temple et en trois jours je le relèverai!» Après la Résurrection les disciples on compris que le Temple dont parlait leur maître, c’était son corps! Ce n’est que dans la foi qu’ils pouvaient adhérer à cette vérité que le Temple, le lieu par excellence de la présence de Dieu parmi les humains, le lieu du rapport entre Dieu et nous, C’est Jésus lui-même. Fini les sacrifices, les animaux à immoler! Désormais c’est toute une vie selon les paroles et les gestes de Jésus qui devient le lieu de la rencontre avec Dieu.

Car il ne s’agit plus de marchander. Il s’agit plutôt d’accueillir l’Esprit dans le souvenir des paroles de Jésus, dans des événements qui offrent des nouveautés et de faire de toute notre vie le lieu de la rencontre avec Dieu. Dieu, source de toute bienveillance, est toujours là pour relancer notre capacité d’aimer, pour renouveler notre espérance face aux adversités rencontrées.           

Le temps du carême nous invite à nous retirer au désert. Et cette semaine c’est l’image du désert de nos villes que nous mettons de l’avant. Alors que la mentalité ambiante nous force à tout compter, à bien calculer nos investissements, l’Évangile nous rappelle que le plus important dans nos vies ne se marchande pas, ne se calcule pas. Il ne peut qu’être donné et accueilli dans une multitude de gestes et de paroles quand nous nous trouvons devant des gens seuls et isolés, des gens qui soufrent de maladie, d’injustice,des gens qui arrivent de l’étranger, loin des leurs. La bienveillance de Dieu ne se monnaye pas. Avec vigueur, aujourd’hui, Jésus renverse les tables où nous calculons nos investissements en temps et en énergie pour convertir nos cœurs et nos esprits. En 2012, comme à l’époque, l’Évangile nous apparaît une folie. Mais une folie qui, après coup, est plus sage qu’on ne le pensait car elle renouvelle notre capacité d’aimer.

Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal