Notre temple à Montréal Communauté chrétienne
Saint-Albert-Le-Grand de Montréal
Contrôler votre inscription au registre de la Communauté

Le Saint-Sacrement (C)

 

Faire mémoire de Jésus 

6 juin 2010

Yves Cailhier


La célébration du Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Christ, autrefois appelée la Fête-Dieu, n’est pas récente. Elle a été instituée au Moyen-âge, en 1264, par le pape Urbain IV, à une époque où les gens ne communiaient guère, pour ne pas dire jamais. Pourtant on croyait que le Christ était vraiment, réellement et substantiellement présent dans l’hostie sous les espèces du pain et du vin. C’est de cette époque aussi que date l’élévation de l’hostie après la consécration : on voulait voir l’hostie dans laquelle Jésus était maintenant réellement présent.

L’adoration du Christ présent dans l’hostie a eu la vie dure et connaît même un renouveau aujourd’hui, particulièrement chez certains jeunes catholiques. Ce culte ou cette dévotion risque malheureusement de faire perdre l’essentiel du mystère de l’eucharistie. Dom Prosper Guéranger, fondateur de l’abbaye de Solesmes en France au XIXe siècle, disait fort justement : « On adore Jésus présent dans l’hostie, parce qu’on la conserve pour les malades et les mourants, mais on ne conserve pas l’hostie pour l’adorer ». C’est en effet détourner l’eucharistie de son sens premier et profond qui est d’être un repas partagé et à partager pour se souvenir de Jésus. L’eucharistie n’est pas un objet de contemplation, mais une pratique.

Le geste de Jésus à la dernière Cène se situe autour d’une table pendant un repas. En partageant le pain et le vin, il se crée entre les convives des liens, une fraternité, une communion. Faire sa première communion, c’est participer pour la première fois au partage du pain et du vin, communier au Corps et au Sang du Christ, avec toute l’assemblée et faire Église.

C’est l’assemblée qui refait les gestes de Jésus, qui se rappelle le partage du pain et de la coupe à la dernière Cène, la veille de la mort de Jésus. Le pain rompu et la coupe de vin partagée, « corps livré » et « sang répandu », se réfèrent explicitement à la passion et à la mort de Jésus, à son « sacrifice » sur la Croix, pour la libération et le salut du monde. Il faut aller cependant plus loin que cet aspect « sacrificiel », sur lequel on insiste peut-être trop parfois.

« Faire mémoire de Jésus », c’est sans doute se rappeler sa vie donnée sur la Croix, mais c’est aussi se rappeler toute sa vie, ce qu’il a été, ce qu’il a fait, toute son action libératrice et salvatrice. C’est se souvenir qu’il est venu annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres, aux malades, aux infirmes, à tous les éclopés de la vie. C’est se rappeler qu’il a proclamé les Béatitudes et qu’il s’est identifié aux plus petits et miséreux d’entre les humains comme le souligne l’Évangile de Matthieu au chapitre 25.

« Faire mémoire de Jésus », c’est s’engager à sa suite à libérer et sauver l’humanité, à combattre l’injustice, à mieux distribuer les richesses, à secourir tous ceux et celles qui sont en manque.

Célébrer l’eucharistie, c’est s’engager à la suite de Jésus à partager ce qu’on a et ce qu’on est. L’eucharistie est une invitation au partage. Ce n’est pas par hasard que le récit de la multiplication des pains est proposé par la liturgie comme évangile de la Fête du Corps et du Sang du Christ. L’eucharistie est appelée à être partagée et invite au partage. A la dernière Cène, Jésus rompt le pain et fait circuler la coupe « pour vous », c’est-à-dire les disciples présents, mais aussi, ajoutent certains textes du récit de l’institution, « pour la multitude ».

Le don reçu dans l’eucharistie invite au partage, à l’exemple de Jésus, qui a nourri les foules affamées qui le suivaient pour l’entendre. Le père Pedro Arrupe, ancien général des Jésuites, très engagé dans la théologie de la libération, a fort bien exprimé cette cohérence indispensable entre pratique eucharistique et pratique de la vie quotidienne :

« Si la faim existe quelque part dans le monde, notre célébration de l’eucharistie est incomplète partout. Dans l’eucharistie nous recevons le Christ qui a faim dans le monde des affamés. Il ne vient pas à nous tout seul, mais avec les pauvres, les opprimés, ceux qui meurent de faim sur la terre… Nous ne saurions recevoir dignement le Pain de Vie, à moins de donner nous-mêmes du pain à ceux qui en ont besoin pour vivre, où qu’ils se trouvent, quels qu’ils soient » (Pedro Arrupe, s.j., Écrits pour évangéliser, DDB, 1985, p. 52).

L’évangile de la multiplication des pains vient nous rappeler que nous sommes appelés nous aussi, à multiplier le pain, pour que chaque être humain sur la terre puisse en avoir et satisfaire ce besoin essentiel et symbolique de la vie. Tant que ce besoin ne sera pas satisfait, nous aurons à célébrer l’eucharistie et nous souvenir que Jésus a donné à manger à ceux qui avaient faim et qu’il nous invite à faire de même.


Vous pouvez faire parvenir vos commentaires sur cette homélie en envoyant un message à

commentaires@st-albert.org


 


Communauté chrétienne Saint-Albert-Le-Grand de Montréal
Accueil    Homélies    Organisation    Événements    Célébrations    Inscription
Plan du site    En haut