« Quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux ». Nous l’avons entendu bien des fois cette phrase d’Évangile. Ce dimanche de la rentrée est un moment propice pour nous y faire prendre conscience. L’Évangile est pour ce jour, pour cette rentrée. La présence et la mémoire de cet homme Jésus est au milieu de nous, puisque nous sommes ensemble. Ce n’est pas rien. En prenons-nous vraiment la mesure? Ne cherchons pas ailleurs; aujourd’hui comme demain, là ou deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là.
Et les autres passages que nous venons d’entendre peuvent nous ouvrir au sens que nous voulons donner à cette fête de la rentrée. Ces passages nous renvoient à une réflexion commune sur la qualité de notre vie, de nos relations aux autres dans la mémoire du Dieu de Jésus. Jésus n’a eu qu’un souci dans sa trop courte vie : faire lever l‘espérance de son petit peuple… L’espérance engendre de nouvelles relations humaines, une autre qualité d’attention à l’autre et aux autres, le souci d’une relation vraie, aidante.
Une belle image, celle qu’Ézéchiel nous a rappelé : « Je fais de toi un guetteur ». Le guetteur, on peut le voir parfois comme une personne rigide, marchant au pas militaire. Au contraire, le guetteur est celui ou celle qui entend, qui regarde, qui voit au loin, parce qu’il guette la vie, parce qu’il veut protéger la vie des autres. Nous sommes chacune et chacun à notre façon des guetteurs. C’est peut-être tenter de changer notre regard sur l’assemblée, sur notre manière de faire Église. C’était le sens de l’invitation que nous vous avons faite au début de la célébration : tout simplement quitter notre place habituelle pour nous permettre de connaître d’autres personnes.
Toujours dans le même sens, Paul nous redit qu’il n’y a qu’une dette qui compte: celle de l’amour mutuel. C’est une attitude de fond. On est responsable les uns des autres.
L’affirmation est bien belle, mais la vie a ses grandeurs et ses limites. Tout ne va pas toujours pour le mieux, il faut se parler et même se reprendre parfois… « Si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute ». Pas question de le juger, de l’accuser. On sait d’expérience qu’il est parfois plus facile des parler de l’autre que de parler avec l’autre. Savoir, dans la modestie, reprendre l’autre quand on croit qu’il s’est trompé, tenter le dialoguer pour que cette personne ne soit pas complètement isolée, sorte de mort lente. « Ce que vous aurez délié sur la terre, sera délié dans le ciel ».
Le passage d’Évangile montre à la fois, le naturel, la délicatesse avec laquelle le discernement se fait, sans plan préétabli, sans préjugé sur l’orientation que le Seigneur veut donner aux choses, avec l’humble désir de laisser l’autre vivre et de permettre qu’il ne s’isole pas.
Que faire avec celles et ceux qui ont un comportement déviant? Rester à l’écoute de leur vie. C’est ce que tente de faire et recommande Jésus; écoute de l’Évangile et de sa sagesse; écoute de la vie et de ses interrogations. Aucunes structures, même si elles sont nécessaires, ne doivent remplacer ou arrêter le mouvement de la vie et de l’Évangile.
L’Évangile ne se vit pas dans un mouvement d’exclusion, mais d’inclusion, l’Évangile convoque, accueille mais dans la vérité de chacune et de chacun. Là où deux ou trois, je suis au milieu de vous. C’est une présence significative… Si la personne ne veut rien entendre, considérer la comme un païen et un publicain. Remarque : est-ce que Jésus n’a pas été si près des païens et des publicains? Alors, il n’y a rien de définitif, il faut savoir attendre et espérer.
Ce que Jésus veut nous dire c’est que bien au-delà des institutions et des édifices, la présence du Christ au monde tient le plus souvent au simple rassemblement de quelques personnes pour apprendre à partager, servir et célébrer la vie. C’est ce que nous voulons nous rappeler à ce dimanche de la rentrée pour que l’année qui vient soit une année où on prenne conscience de l’importance de cette assemblée dominicale dans laquelle se lèvent des interrogations sur nos façons de faire, d’aimer, de se pardonner, de s’aider.
Découvrir une assemblée ouverte accueillante et pas seulement des retrouvailles pour les habitués; ouvrir notre assemblée aux gens de passage… Changer, à même notre expérience notre regard, notre façon de vivre l’Église… Mais aussi faire confiance à notre assemblée. Elle a ses limites bien sûr et parfois de grosses, mais elles a aussi plein de possibilités. On ne peut pas, dans notre expérience, compter que sur les structures qui nous portent sans qu’on y mette son effort. Il y va de la qualité de notre expérience de vie croyante. Il y a une urgence dans notre Église de trouver des assemblées dominicales libres, où l’intelligence a sa place; des assemblées signifiantes et responsables; c’est la responsabilité de chacune et de chacun. À nous d’y apporter ce que nous pouvons pour soi et pour les autres. Soyons des guetteurs sur nous-mêmes d’abord, pour voir au-delà de nous mêmes.