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La Toussaint et le jour des défunts

4 novembre 2007

Jean-Claude Breton
Jean-Claude Breton
Apoc 7, 2-4, 9-10

Matt 5, 1-12

Jean 3, 1-3

Si je n’avais pas un peu peur de paraître irrévérencieux, je vous dirais d’entrée de jeu l’impression que j’ai eue à la première lecture des textes proposés pour la liturgie d’aujourd’hui. Je me suis senti devant un message de loto Québec. Même diversité de moyens de gagner le gros lot. Bien sûr on ne mentionne pas ici les « mini, 649 ou 747 », mais on suggère qu’il y a plusieurs chemins pour se rendre au but, pour faire son salut. On peut tout simplement être né dans le bon milieu et appartenir à une des 12 tribus promises au salut éternel. Mais on peut aussi faire partie de la multitude de ceux et celles qui se trouvent devant le trône, vêtus de la robe blanche et ainsi admis en gagnants au repos définitif. Les chemins proposés par les deux autres lectures sont un peu plus exigeants, mais tout aussi prometteurs. L’évangile des béatitudes propose une diversité d’attitudes et d’options qui sauront nous mener au but désiré, tandis que l’épître de Jean, que nous lirons à la fin de la célébration, nous garantit que la pratique de l’amour est la voie par excellence pour suivre Jésus.

Toutes ces voies mises de l’avant pour atteindre le salut témoignent surtout de l’importance reconnue à la recherche du salut, à la quête de l’achèvement personnel définitif. Savoir si et comment réussir sa vie; trouver le chemin de sainteté, parvenir à vivre avec ses voisins selon la volonté de Dieu sont des préoccupations très anciennes et très profondes. Dans notre monde de sciences et de technologies où nous sommes quand même parvenus à prévoir certains imprévus et à contrer de nombreuses menaces à notre vie, nous ne comprenons peut-être pas très bien tout ce que l’avenir en général et l’achèvement ultime de sa vie pouvaient impliquer dans le passé, au moment où les lectures de ce matin ont été rédigées par exemple. Sans éliminer la peur de la mort, nous sommes quand même parvenus à domestiquer pas mal de ses signes avant-coureurs. Est-ce à dire que l’objectif ultime n’a plus d’importance à nos yeux? Est-ce à dire que la sainteté n’a plus de sens pour nous?

Il semblerait bien que non si on prend en considération le nombre de canonisations célébrées par Jean-Paul II. Les foules qu’il a rassemblées autour de ces événements suggèrent même que la reconnaissance accordée à certains d’entre nous garde encore tout son poids. Comment expliquer autrement les efforts consentis pour obtenir la canonisation des personnes estimées; comment apprécier autrement les réactions enthousiastes aux annonces et aux célébrations de canonisation?

Mais ces changements dans les pratiques pontificales ne doivent pas nous faire oublier deux composantes fondamentales du salut attendu. Premièrement, et c’est le sens de la lecture de l’Apocalypse proposée aujourd’hui, le salut est un don de Dieu. Peu importe la façon de le dire, que ce soit par appartenance à une tribu choisie ou par élection personnelle, il ne faut jamais oublier que le salut est un don de Dieu. Deuxièmement, le salut se réalise par et dans la réception que nous faisons de ce don. Comme le disent les deux autres lectures de ce jour et de nombreuses autres lectures de l’Évangile, il nous revient de faire fructifier le don reçu. À notre mesure sans doute et selon nos moyens, mais dans une volonté réelle de répondre à l’appel de Dieu. Ce n’est pas l’« école des fans » où tout le monde gagne sans autre formalité que d’avoir participé!

C’était, il me semble, l’esprit à l’origine de la fête de la Toussaint et de celle des défunts qui lui est si proche. Dans le passé, on a ainsi voulu que les bonnes personnes, à qui il n’était pas possible, pour toutes sortes de raisons pas toujours avouables, de compter au nombre des saints bien identifiés, que ces bonnes personnes puissent au moins faire partie du club des « saints anonymes ». La fête permettait même d’inscrire à cette liste des personnes qui avaient répondu à leur manière au don de Dieu, mais qui ne l’avaient pas nécessairement fait de façon à être reconnues par toute l’Église.

Dans la situation actuelle où la sainteté a été largement démocratisée, il ne faudrait pas oublier les deux composantes rappelées par les lectures d’aujourd’hui. La sainteté est d’abord un don offert. Elle est aussi un don reçu et développé dans un geste responsable. Que la sainteté soit officiellement et publiquement reconnue ou qu’elle demeure un secret bien gardé importe peu, quand elle est ainsi comprise. Car si elle est reconnaissance d’une vie réussie, elle est d’abord le fruit d’un don.

Les changements en faveur de la démocratisation de la sainteté vont dans le sens traditionnel de la Toussaint : il y a de la place pour tout le monde dans le royaume de Dieu. Mais ils nous exposent aussi à la tentation de vouloir tirer le numéro gagnant pour être reconnu sur la place publique. Célébrons plutôt la générosité de Dieu à l’œuvre dans nos vies et la fidélité avec laquelle il nous arrive parfois de répondre à ces dons.

Notre célébration de la Toussaint et des défunts ne doit pas devenir, à mon avis, la fête de la déresponsabilisation. Elle est double reconnaissance. D’une part pour la générosité de Dieu qui ne cesse d’appeler et, d’autre part, pour la fidélité de la réponse de nos frères et sœurs du passé, du présent et sans doute futur.

 


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