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20e Dimanche du temps ordinaire

19 août 2007

Jean-Claude Breton
Jean-Claude Breton
He 12, 1-4
Luc 12, 49-53

Avec un peu de cynisme, on pourrait dire que la mission que Jésus se donne dans l’évangile de ce matin a été bien réussie. On attend encore la paix et on observe la division entre les disciples. Si les chrétiens semblent manifester un peu moins de zèle à faire la guerre au nom de leur foi, il faut bien se rendre compte qu’ils ne sont pas parvenus, loin de là, à faire la paix. La division continue de tenir le dessus du pavé et le texte récent de Benoît XVI sur le statut unique de l’Église catholique romaine est un indice que les choses ne semblent pas près de changer. Mais ce n’est pas grave, Jésus avait annoncé qu’il n’apporterait pas la paix.

Lire ainsi l’évangile de ce matin soulève beaucoup de réactions chez les artisans de paix que nous essayons parfois de devenir, même si nous ne le sommes pas toujours avec autant d’efficacité que nous le souhaiterions. Bien plus, semblable lecture s’oppose ouvertement au reste du message évangélique. Si nous souhaitons être artisans de paix, c’est que nous avons compris que c’était là la vocation à laquelle Jésus nous appelait. Tout l’évangile en fait se veut une invitation à la réconciliation et à la paix, des conditions indispensables au règne d’amour voulu par Jésus. Il faut donc trouver une autre façon de comprendre l’évangile de ce matin; il faut sortir d’une lecture de premier niveau qui prend un extrait évangélique au pied de la lettre et qui l’élève au rang de message absolu. Qu’est-ce que Jésus a bien voulu dire en proférant les mots de l’évangile de ce matin? Je propose quelques pistes de réflexion que vous pourrez compléter à votre manière.

D’abord, le contexte de l’extrait de ce matin invite à penser que Jésus veut souligner l’importance de son message. Si son enseignement risque de devenir une occasion de discorde, c’est qu’il appelle à un engagement sérieux et qu’il ne se plie pas facilement aux négociations. En évoquant les divisions éventuelles, Jésus veut nous prémunir contre les tentations d’en prendre et d’en laisser dans notre lecture pratique de l’évangile. S’il acceptera parfois une démarche progressive dans l’acceptation de l’évangile, il nous dit ce matin que l’option évangélique une fois prise, il n’est plus question de négocier et cela, même au risque de créer des froids dans l’entourage.

Il me semble aussi que Jésus nous annonce qu’il faudra apprendre à vivre l’évangile dans et malgré les divisions. Par divisions, on peut entendre bien sûr celles qui existent entre les chrétiens et les non chrétiens, mais aussi celles qui naissent même entre chrétiens. Dans notre contexte actuel, il n’est pas inutile de rappeler cet enseignement de Jésus, car le christianisme, surtout catholique, a eu tendance à favoriser plutôt l’unanimité. Une unanimité que nous conjuguons d’ailleurs facilement avec l’exclusion. En ce sens, il n’y aurait, dans la plupart des circonstances, qu’une manière d’être chrétien et les dissidents seraient rapidement identifiés à des ennemis à craindre et à ne pas fréquenter. Jésus plaide plutôt, dans l’évangile du jour, pour une acceptation de la division. Permettez-moi une petite digression ici pour souligner comment la permission récente du retour à la messe en latin peut être interprétée comme aussi une acceptation de la division. En permettant de célébrer de façons différentes, le pape admet d’une certaine manière qu’il peut exister différentes façons d’être chrétien. Espérons qu’il permette d’étendre cette permission à l’extérieur de la liturgie!

Peut-on aller encore plus loin et suggérer que l’évangile de ce matin voit dans les divisions un chemin de paix? Je m’explique. Il ne s’agit pas de dire que les divisions sont en elles-mêmes un chemin de paix, mais de reconnaître que la paix souhaitée et voulue par Jésus se construira en prenant en compte les divisions. Pas d’angélisme, qui refuse de voir les divisions. Pas d’autoritarisme, qui cherche à faire disparaître les divisions en imposant une opinion unique. En ce sens, on pourrait dire que, si Jésus souligne les exigences non négociables du message évangélique, il invite aussi à respecter les options différentes que les autres peuvent prendre au nom du même évangile. Parler ainsi souligne la richesse du message évangélique et l’impossibilité de l’enfermer dans un discours unique, dans un comportement uniforme. Parler ainsi oblige aussi à respecter la compréhension du message évangélique à laquelle d’autres sont parvenus.

À notre époque du dialogue interreligieux, ne pourrait-on pas aller encore un peu plus loin et suggérer que même les divisions entre chrétiens et non chrétiens sont chemins de paix? Est-ce que les recherches religieuses et spirituelles des non chrétiens peuvent, elles aussi, aider les disciples de Jésus à mieux comprendre son message et à mieux vivre l’évangile? La réponse n’est pas évidente et ne s’impose sans doute pas avec la même force face à nos pratiques quotidiennes, mais la question mérite d’être posée pour faire place à d’éventuels apprentissages, qui pourraient être fructueux pour le futur de l’évangile.

Il vous viendra peut-être d’autres réflexions, d’autres développements possibles à la suite de la lecture de l’évangile de ce matin. Tant mieux, car c’est là, il me semble faire l’expérience concrète de la fécondité de la parole de Dieu. Le texte nous fait vivre, pas d’abord en raison de la compréhension matérielle de son sens, mais parce qu’il est habité par l’Esprit et qu’il n’a jamais fini de proposer du sens neuf et vivant. Si nos eucharisties se composent du partage de la parole et du pain et vin, c’est pour nous redire constamment que le signe de la présence du Christ et de son Esprit dans le pain et le vin est aussi le signe de cette même présence dans la parole partagée.

 


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