D’un cœur simple et libre
Il y a à peine un mois, je sortais du couvent St-Albert
avec des vêtements
sur mon bras. Près de la porte de sortie, quelqu’un était
assis sur une banquette. Je le salue; il me répond. Il ajoute ceci :
vous pourriez bien me donner un de vos vêtements; vous ne me semblez
pas dépourvu. Je lui réponds que j’avais besoin de mes
vêtements
pour les prochains jours. Et la conversation se termine par un sourire de part
et d’autre. Une rencontre qui était de nature à nous donner à penser,
l’un et l’autre.
Dans la lecture évangélique de ce dimanche, Jésus nous
attire sur une terrain qui fait peur : le terrain de la générosité folle?
La générosité, nous la pratiquons tous de certaines manières,
mais c’est une générosité prudente. Jésus
observe les gens qui mettent de l’argent dans le tronc du Temple; des
riches mettent de grosses sommes. Ça le laisse assez froid. Mais soudain,
Jésus est aimanté par quelque chose de très différent :
l’offrande d’une pauvre veuve. La veuve que Jésus admire
est d’une pauvreté à faire tout craindre. Mais elle est
riche d’une foi qui lui donne peut-être envie de rire quand disparaissent
ses dernières piécettes : une certaine désinvolture!
Nous voici dans la radicalité de la foi, dans une attitude profonde
et non seulement en train de mousser le succès de la quête de
dimanche prochain. La veuve est une des plus belles images de Jésus :
elle fait éclater
la foi qui chasse la peur du lendemain. Voilà pourquoi Jésus
l’admire, elle est de sa race. La veuve ne donne pas seulement ce qui
lui reste pour vivre, elle se livre elle-même comme si elle se donnait
totalement à Dieu. Elle ne demande pas comment elle va faire désormais
pour vivre. Elle fait un saut dans l’abandon total d’elle-même
au Seigneur. Elle est vraiment fille d’Abraham, elle espère contre
toute espérance. Elle se lance dans les bras de Dieu.
Regardant cette pauvre veuve, Jésus devait sans doute penser à lui-même.
Lui aussi devait livrer sa vie, abandonner toutes ses sécurités
humaines, perdre l’appui de ses amis les plus proches : Lui aussi
devait entrer dans l’abandon le plus total : Mon dieu, pourquoi
m'as-tu abandonné? Lui aussi devait s’en remettre uniquement à son
Père,
dans la nuit de la confiance. Ce n’est qu’après la nuit
de la mort que la réponse du Père éclatera dans la Résurrection.