Une foi allumée
Dans l'évangile de Mathieu, dix jeunes filles attendent l'époux pour entrer dans la fête des retrouvailles.
Dans l'église primitive, héritière de l'expérience de Jésus, une forte espérance d'un retour prochain du Christ et d'un temps nouveau, gardaient en éveil la jeune communauté.
Encore en 2005, il y a une importante cohorte humaine qui
porte en avant le rêve d'un monde de justice et de paix, en son Nom.
Ce texte n'a pas vieilli; il nous rend solidaires d'une même attente étalée sur 20 siècles.
Pendant leur veille, les jeunes filles s'étaient endormies car l'époux tardait et… il arriva au milieu de la nuit. Le feu des lampes à l'huile devient essentiel pour accompagner le cortège.
Dans notre nuit contemporaine traversée de catastrophes naturelles, de malhonnêtetés, de pandémies, de violences de toutes sortes, de matérialisme et de souffrances, à quel feu allumerons-nous notre espérance?
Où trouverons-nous la compassion nécessaire pour ceux qui ont froid et faim, la chaleur pour accueillir l'étranger, la générosité pour être présence auprès des personnes seules, la force d'une parole pour les sans-voix, la tolérance pour nos relations familiales ou de travail, le désir de partager nos richesses…
Où, si ce n'est dans la foi!
La foi en la vie, la foi en l’humain, la foi en Dieu. La foi est comme
une petite lampe au fond de nous qui jette un peu de lumière sur nos doutes,
réconforte notre vaillance devant la grandeur des défis et assure
l’avenir de notre humanité.
Croire nous garde en état de veille, en tension d'une réponse qui peut faire advenir le temps de la Parole. Et cette Parole libère les forces de l'amour en nous et dans le monde.
Nous sommes des gens de veille, notre nuit est traversée d'une clarté qui s'appelle « Espérance ». L'espérance de bâtir un monde qui peut être meilleur.
Dans les lampes des jeunes filles ne fallait-il pas une provision
d'huile suffisante pour arriver au terme de leur attente?
Certes il n’y a pas eu de geste de solidarité féminine quand
la provision d’huile vint à manquer, mais la pointe du texte nous
renvoie à notre responsabilité personnelle et non-transférable,
de la dynamique que l’on insuffle à notre vie.
Pour nous, si la prière faisait office d'huile pour nos lampes intérieures et de carburant pour notre foi? La prière ne permet-elle pas ce dialogue avec Dieu, avec nous-mêmes et avec les autres? Dialogue qui nous empêche de nous endormir, qui nous amène à souhaiter que quelque chose arrive, qui nous tient prêt à entendre, à écouter les appels de la vie. « Un œil tourné vers le dehors, un autre tourné vers le dedans » comme l'écrivait le poète Gilles Vigneault. Aussi bizarre que cela puisse paraître, ce double regard sur le monde et sur sa propre vie intérieure est au cœur du parcours chrétien.
Et nous voilà de dimanche en dimanche, à se rassembler pour faire eucharistie, pour se mettre en état de veille et d'éveil ensemble, pour affûter notre regard sur les autres, pour partager le pain, la vie, Dieu, la rencontre. Ensemble nous prenons corps, nous prenons le temps de nous nourrir dans cet espace significatif, nous renouons avec Dieu, avec nous-mêmes et avec cette espérance que la Parole dépose en nous par la prière, le silence et le chant.
2,000 ans de veille et ça continue!
Que nous soyons des l'abbé Pierre, des Nicole Fournier, des Viviane Labri ou de cette multitude de personnes anonymes qui veulent soulager, supporter ou défendre la vie et les humains, l'appel est le même :
« Veillez et priez car vous ne savez ni le jour, ni l'heure! »
L’époux n’ouvre pas aux retardataires,
surprenant!
Certes, mais cette attitude nous rappelle que l’urgence de ce temps c'est
d'habiter le moment présent et
d'y apporter sa contribution personnelle, allumés par l'invitation de
l'Évangile de ce matin.