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Vitrail ou melting pot

Il n’y a pas si longtemps l’humanité comptait une population peu nombreuse et très clairsemée sur un vaste territoire. De nos jours, il en va tout autrement. Les six milliards et demi d’humains habitent un grand « village planète » interconnectés grâce à un filet ( le web) qui nous relie les uns les autres. Nous devons vivre en communiquant même avec nos plus lointains voisins. Nous dépendons les uns des autres en échangeant nos biens matériels comme nos biens culturels.

Alors que faire pour rester soi-même, préserver son identité et ses valeurs propres? Jamais chez nous en particulier, une telle situation de promiscuité ne s’était présentée où nous devions accueillir tant de diversité sur un même territoire en un laps de temps si court. Voilà qu’au moment où nous nous trouvons désemparés, nous inventons la chose, que dis-je, l’expression sauve-qui-peut les accommodements raisonnables. Le mot est lancé « Il faut faire avec », comme on dit.

Acheter un frigo ou un ordi made in Malaysia, il n’y a aucun problème, mais côtoyer un jeune à l’école portant fièrement son kirpan à la taille ou rencontrer un sikh dans le port de Montréal avec un turban (donc, sans casque protecteur) et qui plus est, s’asseoir dans le métro aux côtés d’une femme revêtue de pieds en cap d’un tchador ou d’un burka, voilà des situations qui portent à réfléchir. Nous avons abandonné pour de bon la société quasi monolithique des années 1950, celle de mon enfance où nous amassions des sous pour sauver des petits Chinois fort loin de notre nid douillet. Maintenant, ils sont dans notre cour avec leurs us et coutumes. Nous avons mis trop de temps à réagir à la transformation culturelle de notre monde. La géographie et l’histoire qu’on nous a enseignées ne nous ont pas appris grand-chose sur l’autre Monde, celui des populations milliardaires depuis peu : Chinois, Indiens sans compter les Moyens-orientaux qui n’en finissent plus d’avoir des problèmes et de faire des enfants alors que nous…

Au moment où notre pays est perçu comme une oasis de paix dans laquelle il est permis de rester soi-même grâce à une Charte des droits de la personne unique en son genre, que faire sinon accueillir les nouveaux venus avec le respect dû aux personnes déplacées et immigrantes? Cependant ne faut-il pas accueillir les gens comme des invités dans notre propre maison? Ils doivent se sentir à l’aise, mais ils ne peuvent exiger de voir le menu du repas à moins qu’ils aient des allergies… ne peuvent demander de changer la couleur de la nappe parce que la couleur rouge les offusque… Il y a des limites à tout. En attendant d’acculturer les nouveaux venus, il faut trouver des accommodements raisonnables quand c’est possible des deux côtés, mais jamais au détriment de nos valeurs les plus enracinées. S’il y a incompatibilité, le gros bon sens exige de rester chez soi avant d’immigrer dans un endroit où on ne serait pas le bienvenu. Sinon, le risque de conflit augmente et le mal-à-l’aise s’installe quand ce n’est pas le mal à l’âme. Le tout au détriment des deux parties.

Que faire dans notre cas? D’abord au niveau des services à l’immigration, il leur appartient de dire les choses clairement aux candidats immigrants en conformité avec les valeurs, les lois et les règlements du pays qui reçoit. Tout en étant pleins de bonne volonté,  les citoyens du pays hôte ne peuvent aller au-delà d’un certain seuil de tolérance parce que leur identité en prendrait pour son rhume…D’où un grand exercice de communication entre les habitants du pays hôte, d’abord entre eux puis avec ceux et celles qu’ils veulent recevoir afin qu’ils deviennent peu à peu leurs concitoyens à part entière. Cela doit se faire dans le plus grand respect des exigences essentielles de leur éventuel nouveau pays, exigences en lien direct avec les valeurs indiscutables de ceux et celles qui ont l’amabilité de recevoir.

Bref, dialogue, respect mutuel des gens et des cultures sont des solutions clés.  Le seuil de tolérance est toujours fixé par ceux qui invitent et non par les invités comme dans une maison lors d’une fête.
L’appartenance culturelle ou religieuse ne peut aller à l’encontre des valeurs et des principes fondamentaux énoncés par le pays hôte… Pendant les années 1910, le Canada recevait beaucoup plus d’immigrants qu’aujourd'hui, mais le pays était vaste et vide.

Chaque groupe ethnique (notez qu’à l’époque le mot race était plus à la mode) allait s’installer avec ses us et coutumes sur de nouvelles terres sans trop menacer les valeurs des Autochtones (je pense aux Doukhobors ou aux Mennonites par exemple). De plus, la laïcité de notre monde occidental contemporain heurte davantage les comportements et les obligations religieuses des nouveaux venus. N’a-t-on pas noté que la plupart des compromis ou accommodements consentis visaient des comportements religieux? Dans un État laïc où la séparation de l’Église et de l’État est chose faite, il faut analyser la situation source de conflit potentiel, à l’aune de cette réalité. Comment trouver une solution qui satisfasse un chacun?

Vitrail ou melting pot? Le feu de l’astre du jour est tellement plus beau à travers un vitrail de cathédrale : chaque petite pièce de verre laisse passer la lumière selon sa propre teinte ou densité de couleur. L’ensemble nous émerveille avec raison. Le melting pot est rassurant parce qu’il y a homogénéité et cohérence. Vivrions-nous dans un monde avec une ou deux langues pour communiquer (par exemple l’anglais et l’esperanto), alors que « C’est la diversité qui crée la force, la persistance de la vie », dixit Henri Laborit? Personne ne possède la solution quand il faut conjuguer l’un et le multiple. Après les premiers essais avec la Charte universelle des droits et libertés, pourquoi ne pas s’attabler à la grande table ronde de l’ONU pour écrire un deuxième chapitre au grand Livre de l’Histoire post-moderne? Cela afin d’établir les règles d’un vrai modus vivendi d’échanges culturels planétaires. Il y aurait tellement à faire avec les milliards que certaines nations belliqueuses gaspillent à faire la guerre ou à la préparer. Créons un immense vitrail avec des soudures d’amour au lieu d’uniformiser, d’écraser et de triturer les « ingrédients » dans un melting pot.

 C’est ce que je nous souhaite en ces temps de Résurrection.

Jean Ouimet

 


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